Heureux ceux qui pleurent

La petite Émilie voit le jour à Montréal en 1800. L’enfant perd sa mère à l’âge de quatre ans. Puis, dix ans plus tard, son père décède aussi.

À 23 ans, elle épouse Jean-Baptiste. Les deux premiers fils du couple ne vivent qu’une saison avant de mourir. Le troisième enfant nait en octobre 1826. Un an plus tard, l’époux d’Émilie rend son dernier souffle. L’automne suivant, son dernier fils, âgé de 21 mois, décède à son tour.

Job

Mere_Veuve_Gamelin_1890

Si le livre biblique de Job est un récit qui n’a rien d’historique, l’histoire d’Émilie Tavernier-Gamelin, elle, est bel et bien arrivée. Mais elle ne s’arrête pas ici.

Complètement atterrée par ces deuils à répétition, elle reçoit de son directeur spirituel une image de Notre Dame des Sept Douleurs au pied de la croix.

Veuve et mère éprouvée, Émilie communie aux souffrances de la Vierge et aux souffrances de son Fils. Elle commence rapidement à accueillir dans sa maison les veuves, les orphelins et les pauvres de Montréal.

Son œuvre, connue aujourd’hui sous le nom des Sœurs de la Providence, croît rapidement et, en quelques années, se répand partout dans le monde.

Bienheureuse

En 2001, le pape saint Jean-Paul II a reconnu la vertu et l’intercession de mère Gamelin. Elle est désormais présentée au peuple des fidèles comme bienheureuse.

À une époque où les marchands de bonheur vendent leur recette miracle et leur combiné fitness-yoga-oméga-3, la béatitude d’Émilie Gamelin est un véritable contrepoids à la culture ambiante.

À une époque où les marchands de bonheur vendent leur recette miracle et leur combiné fitness-yoga-oméga-3, la béatitude d’Émilie Gamelin est un véritable contrepoids à la culture ambiante. La félicité ne consiste pas en une absence de malheurs ni en une négation de ceux-ci en s’enfonçant dans le divertissement.

La vie d’Émilie, l’œuvre immense qui a pu jaillir de ses mains pleines de larmes seraient impossibles sans cette croix – lieu de souffrance incompréhensible –, où son Seigneur l’attendait pour l’épouser.

Heureux ceux qui pleurent…

[Ce texte a paru dans sa version originale dans le numéro d’hiver 2017 de notre revue papier]

Antoine Malenfant

Animateur de l’émission On n’est pas du monde et directeur des contenus, Antoine Malenfant est au Verbe médias depuis 2013. Diplômé en sociologie et en langues modernes, il carbure aux rencontres fortuites, aux affrontements idéologiques et aux récits bien ficelés.