La saison de la morve

Je ne prends jamais de congé de maladie.

Mais ce matin, étant trop dédié à la gestion de mes mucus nasaux, j’ai dû me résoudre à rester à la maison pour me reposer un peu. Séquelle de lendemain-de-lendemain-de-veille-d’élections ou héritage microbien de mes petits morveux domestiques? Mystère.

Constatant l’impossibilité de me reposer à la maison (il y en a quand même trois qui ne sont pas encore à l’école…), j’ai finalement décidé d’aller me reposer au bureau.

Bref, comme d’hab.

Et puisque j’ai une talle de tâches qui m’attend et que mon cerveau enrhumé me chuchote de ne rien entreprendre d’utile, j’en profite pour procrastiner en vous livrant ici, en rafale, mes impressions postélectorales.

  • Tout au long de la campagne, hormis quelques exceptions, la plupart des débats et des conférences de presse ont davantage servi à exposer l’obsession comptable, technicienne et pragmatique des principaux partis qu’à proposer une véritable vision, un projet de société pour le Québec. Entendons-nous, les calculs d’immigration et de salaire de médecins sont nécessaires. Cependant, ils ne devraient jamais éclipser les débats sur les idées qui les justifient.
  • On l’a dit ailleurs, mais je crois qu’on devra le répéter à notre nouveau premier ministre quelques fois dans les prochaines années : la promesse de revoir le mode de scrutin ne sera pas facile à tenir. Certes, la CAQ a obtenu une large majorité de sièges (74/125), mais ne peut se targuer d’un triomphe « populaire » avec moins de 38% d’appuis exprimés dans l’urne. Sans compter que le tiers des Québécois n’ont pas voté.
  • Tous les partis ont réussi à faire élire de nombreuses femmes, mais aussi plusieurs jeunes candidats. Voilà de quoi défriser tous ceux qui disent que les jeunes ne s’intéressent pas à la politique.
  • Attendons de voir le taux de participation par tranches d’âge, mais j’ai l’impression que le vieillissement de la population ne fera qu’augmenter la baisse du taux global de participation au cours des prochaines élections. La dégringolade des « vieux partis » n’est certainement pas étrangère à ce phénomène.
  • Si les médias sociaux permettent à l’information et aux opinions de circuler de manière relativement fluide, ils comportent aussi l’inconvénient de privilégier la publication et la diffusion des idées et analyses les moins nuancées, aux dépens des prises de paroles plus posées et constructives.
  • Le mot « historique » est sur toutes les lèvres depuis deux jours. Ce que je trouve historique, pour ma part, c’est l’étroitesse du vocabulaire utilisé lors des discours. Par exemple, je comprends que l’émotion puisse être grande lors d’une victoire aussi décisive, mais le citoyen que je suis (ou le « payeur de taxes », pour parler comme certains électeurs de la CAQ) aurait souhaité que le premier ministre élu ait quelque chose d’intelligent à dire lors de son premier discours.
  • Enfin, il est de moins en moins évident, pour ceux qui désirent intégrer les principes de la Doctrine sociale de l’Église, de voter pour un parti sans faire d’importantes concessions sur l’un ou l’autre de ces principes: défense de la vie de sa conception à sa fin naturelle, écologie, équilibre entre subsidiarité et solidarité, protection et soutien des plus vulnérables, etc. Ainsi, en combinant l’odeur nauséabonde de certaines idées du parti qui a eu mon vote à l’ampleur du rhume qui m’assaille cette semaine, vous comprendrez que j’ai voté… le nez bien bouché.

Antoine Malenfant

Animateur de l’émission On n’est pas du monde et directeur des contenus, Antoine Malenfant est au Verbe médias depuis 2013. Diplômé en sociologie et en langues modernes, il carbure aux rencontres fortuites, aux affrontements idéologiques et aux récits bien ficelés.