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Photo: Maxime Boisvert

École à la maison : apprendre par coeur

C’est l’heure du déjeuner chez les Bourget. Michelle sert des toasts aux enfants pendant qu’Alexandre en profite pour les questionner sur ce qu’ils ont appris récemment. Bref, un matin normal dans une famille qui a choisi de faire l’école à la maison.

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Avant d’attaquer le programme de la journée, les petites abeilles se mettent chacune à leur tâche. Paul vide le lave-vaisselle, Mélodie sort les poubelles, Laurent passe l’aspirateur. Ayant terminé plus tôt le lavage, Jeanne en profite pour s’exercer au piano.

Quand l’école est à la maison, on apprend autant dans les livres que dans les jeux, dans le jardin que dans la cuisine.

Assis sur le canapé avec maman, Paul s’initie aux rudiments de la lecture. Laurent fait ses exercices quotidiens d’anglais sur l’ordinateur. Quant à Jeanne, l’ainée, seule à la table de la cuisine, elle achève un devoir d’écriture. À la fin de l’avant-midi, si tout se passe «normalement», le programme officiel devrait être terminé. L’après-midi sera libre pour aller dans la nature et poursuivre des projets personnels.

L’école adaptée

Cette liberté de suivre ses centres d’intérêt est très importante pour Alexandre: «Je travaille en informatique, mais je n’ai jamais étudié dans ce domaine-là. J’ai tout appris par moi-même et je sais que j’ai appris dix fois plus vite à cause de mon enthousiasme. Si mes enfants peuvent faire quelque chose qu’ils aiment, quand ils vont arriver sur le marché du travail, ils seront des gens allumés que les employeurs recherchent à cause de leur parcours unique.»

Écoutez l’entrevue d’Alexandre Bourget à On n’est pas du monde :

«Regarde ma fille Jeanne. En allant à son rythme, elle a déjà lu toute notre bibliothèque de 300 livres. Elle n’a pas perdu son temps en ayant plus de liberté; au contraire, elle est allée vite dans ce qui la passionnait.»

Annie, elle, a trois garçons. Au début, elle a pensé faire l’école à la maison, car elle cherchait une formation de plus haut niveau, mais l’école privée était trop chère. Toutefois, après sa première année avec Thomas, son plus vieux, elle a eu une petite surprise:

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«On s’est rendu compte que notre fils n’était pas capable de suivre. Il a reçu un diagnostic de TDAH. Je me suis dit alors qu’à l’école on ne l’attendrait pas, qu’on ne s’adapterait pas à sa manière différente d’apprendre. Ma raison de faire l’école à la maison a donc évolué.»

L’école en famille

Pour ces parents, la première raison de choisir l’instruction à domicile, c’est la culture familiale. En plus de leur donner beaucoup de liberté, cela leur permet de devenir concrètement les premiers éducateurs de leurs enfants.

«Au début, explique Michelle, j’ai commencé pour des raisons pédagogiques, car à quatre ans, Jeanne savait déjà lire des livres et je ne voulais pas qu’elle perde son temps à l’école. Mais maintenant, si je continue, c’est d’abord parce que c’est un projet familial. C’est comme ça qu’on peut être plus proches les uns des autres.»

Même perspective pour Annie: «La grande découverte de l’école à la maison, c’est une vie familiale pleine. Peu importe ce qu’on cherche à la base, c’est surtout ça qu’on trouve. Cette chose-là, c’est la plus précieuse.»


Ce texte est tiré du numéro Éducation du magazine Le Verbe, automne 2019. Pour consulter la version numérique, cliquez ici. Pour vous abonner gratuitement, cliquez ici.


«Je ne suis pas contre l’école et j’aime notre monde. Mais je pense qu’un des travers de notre société, c’est de démanteler la famille. Pour moi, l’école à la maison est un moyen particulièrement puissant pour réunifier la famille et transmettre ses valeurs à ses enfants. L’éducation de mes enfants est le projet le plus extraordinaire de ma vie. Il n’y a aucune autre carrière que je trouverais plus gratifiante.»

L’école avec des amis

La socialisation se fait partout naturellement dans la vie: au parc, à l’épicerie, en vacances.

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«La semaine dernière, Jeanne a vu une dame hassidique passer dans la rue et elle a pu poser des questions, raconte Michelle. Nos enfants ont plus de temps libre pour aller voir leurs amis, plus de temps aussi passé avec leurs frères et sœurs.»

Le vendredi, tout le monde est content: ce sont les journées-coop. Une douzaine de famille se réunissent sur la Rive-Sud de Montréal. Là, les enfants apprennent à socialiser en parlant à des plus grands et à plus petits qu’eux, et pas juste avec des enfants de leur âge.

Tous sont d’accord, s’il y a une erreur à éviter c’est de s’isoler.

Alexandre est convaincu: «La coop Ex Corde Schola, c’est une grande valeur. Le bonheur de l’homme se fait dans les relations. Les relations qui sont tissées là sont plus fortes, car il y a une réelle solidarité entre les parents. C’est une communauté d’amitié très dense.»

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Cette année, les cours sont particulièrement variés: musique, échecs, chimie et même philosophie. Il y a aussi des ateliers pratiques de travail du bois, de couture et de cuisine. Mais le plus intéressant, c’est la grande pièce de théâtre qu’ils préparent tous ensemble et qu’ils présenteront à la fin de l’année scolaire.

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Pendant ce temps, les parents se rencontrent pour partager leur expérience. «Notre groupe de soutien, c’est une grande richesse, lance Michelle. Les parents se sentent appuyés. On échange des conseils et les enfants trouvent des amis.»

Annie appuie: «Le plus grand défi, c’est la bataille contre moi-même. La patience. Accepter que mon enfant ne comprend pas au rythme que je voudrais. Les parents, on est très durs avec nous-mêmes, on se met beaucoup de pression. Voilà pourquoi notre groupe de soutien est vraiment nécessaire.»

L’école de la vie

Qu’est-ce que l’éducation doit viser avant tout?

«La philosophie d’éducation qui me rejoint le plus, répond Michelle, c’est celle de Charlotte Masson. Elle parle de donner un festin d’idées aux enfants, de les nourrir de choses belles, riches et nobles. D’être beaucoup en contact avec la nature aussi.»

Pour Alexandre, il importe d’appeler les enfants à la grandeur et au don généreux d’eux-mêmes. «Ils doivent apprendre à apprécier les splendeurs de la vie, et surtout à contempler profondément tout ce qui est vrai.»

«Penser l’école en terme de métier, c’est rabaisser l’éducation à un niveau de tristesse infini, ajoute Annie. Mon objectif, c’est de faire des saints. Il y a mille manières de dérailler si on ne garde pas en tête le but ultime, le seul vrai but en fait.»

Michelle approuve: «Mon but de mère, c’est d’amener mes enfants au ciel. Et le but de l’éducation, j’imagine que c’est de les outiller pour ça.»


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Simon Lessard

Simon aime entrer en dialogue avec les chercheurs de vérité et tirer de la culture occidentale du neuf et de l’ancien afin d’interpréter les signes de notre temps. Responsable des partenariats pour le Verbe médias, il est diplômé en philosophie et théologie.