Enfin, la jeunesse éternelle!

Bonnes nouvelles pour ceux qui aiment les mauvaises nouvelles. Deux labos états-uniens ont fait simultanément une percée majeure dans le domaine de la longévité.

En greffant deux souris l’une sur l’autre, nous dit-on dans une complaisance scientiste ahurissante, typiquement radiocanadienne, les chercheurs ont réussi non seulement à ralentir le vieillissement, mais à inverser ses effets.

La méthode est d’une simplicité désarmante : on prend une vieille souris, on lui fait passer une batterie de tests. On fusionne ensuite son système sanguin à celui d’un spécimen plus jeune.

Après un mois seulement, elle passe de nouveau les tests et on constate que plusieurs de ses organes ont été revigorés, que sa mémoire est plus vive et que ses facultés physiques sont accrues.

Des souris et des hommes

On applaudit à tout rompre.

Lorsqu’elle sera applicable à l’humain, cette biotechnique de jouvence retardera l’Alzheimer, préviendra les cancers, guérira la presbytie, et je-ne-sais-trop-quoi encore!

Cela peut signifier aussi que, bientôt, le donneur de sang aura deux options : 1) donner son précieux liquide pour sauver des vies ou; 2) vendre son sang à gros prix pour permettre à un vieux millionnaire dégénéré de régénérer son foie abimé par trop de Chateauneuf-du-Pape.

C’est un pensez-y-bien.

Si j’étais président de la Croix-Rouge, je m’inquièterais. Juste un peu.

Anticipation dystopique

Cœurs sensibles, passez à l’intertitre suivant. Pour les autres, je me permets ici une parenthèse de science-fiction, une petite prophétie qu’on espère exagérée.

Les récents scandales de Planned Parenthood laissent entrevoir le pire.

Des scénarios se bousculent dans mon esprit catastrophiste. D’ici 2050, une agence propose un voyage dans un tout inclus, deux semaines, bien branché sur un embryon qui, par une bienheureuse transfusion, se charge de recharger vos batteries…

Éthique à géométrie variable

Bien sûr, cette découverte soulève de graves enjeux éthiques. On vient d’évoquer plus haut quelques dangers d’un transfert de ces avancées vers les humains.

Mais, apprend-on en fin du reportage mentionné plus haut, il est beaucoup trop tôt pour entamer une réflexion éthique.

Quelques années plus tard, on pourra espérer lire un rapport dudit comité nous assurant que tout va bien, dans le meilleur des mondes.

J’imagine que, lorsque les labos de biotechnologie, nos gouvernements et les commanditaires de la Silicon Valley auront investi de gros sous, que les licences seront accordées, les brevets déposés, le temps sera venu de former un comité éthique.

Quelques années plus tard, on pourra espérer lire un rapport dudit comité nous assurant que tout va bien, dans le meilleur des mondes.

Nos élites libérales-libertaires – médiatiques, politiques et scientifiques – qui tiennent un discours soi-disant égalitaire ne semblent pas trop incommodées par l’éventuelle disparité sanitaire engendrée un tel « progrès ».

Tant pis pour les moins nantis. Ils n’auront qu’à demander à « mourir dans la dignité ».

Peu importe. On n’est pas à une contradiction près.

L’horreur de vieillir

Cette découverte nous remet en pleine face l’une des trois grandes questions existentielles : la vie, l’amour… la mort.

Il va de soi que l’angoisse de vieillir est surtout une angoisse de vieillir seul.

Mais quand on a l’espérance d’une vraie vie éternelle, on n’a pas besoin de vampiriser son prochain pour l’obtenir.

Antoine Malenfant

Animateur de l’émission On n’est pas du monde et directeur des contenus, Antoine Malenfant est au Verbe médias depuis 2013. Diplômé en sociologie et en langues modernes, il carbure aux rencontres fortuites, aux affrontements idéologiques et aux récits bien ficelés.