père Glyn
Illustration : Marie-Pier LaRose/Le Verbe

Le handicap dans l’œil du père Justin Glyn

Le prêtre jésuite Justin Glyn est aveugle de naissance. Enfin, presque. Grâce à ses «lunettes télescopiques», il peut voir un tout petit peu. Si le handicap est souvent perçu comme une limite majeure, le père Glyn nous offre pour sa part une tout autre… vision!

«Le monde a toujours été flou pour moi». C’est ainsi qu’il décrit – dans une des vidéos où il témoigne de sa situation – sa réalité de personne vivant avec un nystagmus, une condition qui empêche les yeux de bien focaliser.

La plupart des informations que capte le père Glyn proviennent ainsi davantage de ce qu’il ressent que de ce qu’il voit. Son handicap physique est, selon lui, une « bénédiction ». Il reconnait bien sûr que sa limite physique l’affecte parfois négativement, mais des exemples bien tangibles de ces bénédictions parsèment son quotidien et lui permettent d’étayer sa perspective. Il cite notamment son excellente mémoire, un atout fort enviable pour étudier et pratiquer le droit. Parce qu’il voit moins, le père Glyn retient mieux. Sa passion pour les langues et la musique profite également des lacunes de sa vision. Évidemment, prendre conscience des avantages de son handicap est un processus qui s’est fait «à la longue». Un cheminement intérieur qui se poursuit encore certainement.

Nous sommes tous limités

Avocat civiliste et canoniste, il est le conseiller juridique de la Province australienne de sa congrégation et enseigne le droit canon aux séminaristes. Il écrit également sur des sujets aussi variés que la théologie, le droit et les questions sociales. Le père Glyn a plus d’une corde à son arc!

Dans une autre capsule vidéo de témoignage, nous le voyons célébrer la messe. Des gestes qu’il pose avec d’autant plus d’intention et d’attention. «En tant que prêtre, je trouve que faire l’expérience d’un handicap est une bonne façon de nous rappeler que nous sommes tous des êtres limités. Je ne m’adresse pas aux gens comme quelqu’un qui a toutes les réponses, mais j’ai profondément conscience que nous dépendons tous les uns des autres».

Pour le père Glyn, nous ne sommes pas appelés à être parfaits, mais à offrir simplement ce que nous sommes, soit notre «nature limitée et blessée que nous croyons que le Christ est venu partager». Ainsi, accepter nos limites nous permet d’entrer en relation avec ceux qui nous entourent.

D’où vient le handicap?

Pourquoi certaines personnes vivent-elles avec un handicap ou une limite plus importante? À cette question, le père Glyn répond sans artifice par son exemple et sa réflexion. Il défend les personnes vivant avec un handicap contre les préjugés et les limites que la société impose. Loin de percevoir cette situation comme une punition ou un malheur, il y voit plutôt un mystère, «un secret de notre condition d’être humain à l’image de Dieu».

Si le handicap peut être source de colère, d’incompréhension et même d’exclusion aussi parfois, plusieurs personnes ayant une condition limitée partagent cette expérience au quotidien et témoignent du sens qu’elles y trouvent après un cheminement. Pensons à Zahra Gomari rencontrée par Le Verbe ou encore à Florence Malenfant, mère d’un enfant vivant avec le spina bifida, ou à André Bisson devenu paraplégique… et «plus heureux que jamais»!

«Nous» et non «ils»: faire partie de la société et de l’Église

S’il s’agit d’une réalité qui nous est peu familière, pour certains c’est tout le contraire.  La communauté des Petites sœurs de l’Agneau en France, par exemple, accueille les vocations religieuses de personnes vivant avec la trisomie 21. D’autres encore témoignent, comme Serena qui a pu participer aux JMJ plusieurs fois, que «malgré nos limites humaines, il y a une main qui est toujours prête à se tendre vers nous». Elle évoque aussi sa rencontre avec le pape François et son regard qui semble dire: «Tu es parfaite telle que tu es, il n’y a rien en toi qui ne va pas». Lorsqu’elle lui a demandé pourquoi il n’était pas possible à certaines personnes avec un handicap de participer activement à tous les sacrements, le pape a répondu: «Face aux Sacrements, nous sommes tous égaux». Par cela, il rappelait le droit profond et fondamental de chaque personne humaine à vivre les sacrements et à faire partie de l’Église.  

Ces capsules vidéos font partie de la série #IamChurch (#JeSuisEglise), une initiative du Dicastère pour les Laïcs, la Famille et la Vie, réalisée en 2021 dans le cadre de l’année Famille Amoris Laetitia. Les cinq capsules vidéo produites présentent une perspective différente sur la réalité du handicap, notamment au sein de l’Église. Elles donnent la parole à des personnes vivant avec un handicap, mental ou physique, impliquées dans leur milieu et dans leur vie de foi.

Marie-Jeanne Fontaine

Diplômée en sexologie, Marie-Jeanne chante, jase et écrit. Femme de cœur (elle essaye !), elle trace sa petite route dans le Grand Large du Bon Dieu. Vous la trouverez devant son piano ou dans sa cour arrière, au soleil, en train de faire fleurir ses idées entre deux éclats de rire et un café.