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Patrick Schneider/Unsplash

L’abbé Huvelin, un célèbre pasteur inconnu

Per il mio pastore

C’est le dimanche du Bon Pasteur, journée mondiale des vocations. Un temps pour prier pour nos prêtres – ces temps-ci certes quelque peu « virtuels », mais pourtant bien présents.

Évoquer la figure du prêtre dans le monde, c’est presque immanquablement se heurter aux plaintes, aux dénonciations, etc. Les scandales remplissent trop souvent la place publique, et ce au détriment de tout le bien que font nos pasteurs. 

Benoît XVI, contre la résignation, le doute et le possible refus du clergé, propose à l’Église et au monde un remède très simple : méditer les exemples « des figures splendides de pasteurs généreux, de religieux brulant d’amour pour Dieu et pour les âmes, de directeurs spirituels éclairés et patients ».

C’est ce que je me propose de faire aujourd’hui, en me penchant sur la figure d’un prêtre peu connu : l’abbé Henri Huvelin.

La conversion de Foucauld

En fait, l’abbé Huvelin est à la fois inconnu et célèbre. C’est qu’on le connait indirectement, à travers le plus beau de ses fruits : la conversion du bienheureux Charles de Foucauld.

C’est en 1886 que Foucauld, encouragé par sa cousine Marie de Bondy, entre dans le confessionnal de l’abbé Huvelin. « Monsieur l’abbé, je n’ai pas la foi, je viens vous demander de m’instruire », lui dira-t-il. 

La grandeur de l’abbé Huvelin ne réside pas dans de longues théories, dans une formation spéciale […]. Sa force véritable réside dans sa capacité à dévoiler le Seigneur lui-même. 

Charles ne savait pas que l’abbé Huvelin, de mèche avec Marie de Bondy, priait déjà pour sa conversion depuis plusieurs semaines. Au lieu de répondre à la requête de Foucauld, l’abbé lui demande de se confesser. Charles s’exécute et c’est une véritable renaissance, le début de toutes les grâces.

« En me faisant entrer dans son confessionnal, un des derniers jours d’octobre, entre le 27 et le 30, je pense, vous m’avez donné tous les biens, mon Dieu ! »  

Un père spirituel 

Cette première confession liera Charles de Foucauld et l’abbé Huvelin jusqu’à la mort de ce dernier, 24 ans plus tard. Charles lui promet fidélité, obéissance, dévouement. Car à travers la direction spirituelle de l’abbé Huvelin, c’est la main de Dieu lui-même qu’il voit posée sur lui. 

« Vous m’avez mis sous les ailes de ce saint, et j’y suis resté. Vous m’avez porté par ses mains, et ce n’a été que grâces sur grâces. »

Même exilé dans le désert, les lettres de Charles porteront toujours la trace d’une véritable piété filiale envers son premier confesseur et éducateur dans la foi. Cette tendresse filiale sera comme roc, solide et immuable, résistant à toutes les intempéries et à tous les péchés.

« L’âme de votre enfant est toujours la même, Monsieur l’abbé, toujours pleine de tendresse pour vous, mais toujours aussi pleine de misères, d’orgueil, de vanité, de confiance en mon jugement, de sévérité pour les autres et d’indulgence pour moi, de lâcheté, de timidité et toujours, hélas ! vide de charité ! »

Un directeur de conscience

Pour qui connait seulement en surface la vie de Charles de Foucauld, il y a de quoi surprendre quand on apprend que le bienheureux n’a jamais voulu prendre aucune initiative sans l’avis de son directeur de conscience, simple vicaire dans une paroisse de Paris. 

« Pensez-vous que ceci vienne du Bon Dieu ? C’est sur votre réponse et sur votre avis que je me dirigerai, vous le savez, car un Père reste toujours un père et surtout vous pour moi ! »

Il ne faut pas minimiser l’impact des conseils de l’abbé dans la vie de Foucauld. Celui-ci, rappelons-le, s’est converti à 27 ans. Comme tout jeune homme nouvellement converti, il est tout feu tout flamme. Intense, entier, sans compromis… mais aussi ignorant et imprudent.

Charles veut conformer sa vie entière à une phrase lancée un jour par son père spirituel dans une homélie : « Jésus a tellement pris la dernière place que personne n’a pu la Lui ravir ! »

C’est l’abbé Huvelin qui l’aidera à atteindre cet objectif impossible. Il se fera lumière sur les pas de ce jeune homme au cœur ardent. Il rendra son jugement prudent, humble et obéissant à la volonté de Dieu.

Un médiateur

Comment expliquer l’impact de l’abbé Huvelin dans la vie de Charles de Foucauld ? Car vraiment, « Charles de Foucauld ne s’explique pas sans l’influence de ce grand directeur d’âmes »

La grandeur de l’abbé Huvelin ne réside pas dans de longues théories, dans une formation spéciale. Certes, c’était un homme très intelligent et très érudit. Toutefois, sa force véritable réside dans sa capacité à dévoiler le Seigneur lui-même. 

Si l’abbé Huvelin marque autant Charles de Foucauld, c’est parce que c’est à travers lui que le jeune homme a rencontré pour la première fois Jésus-Christ. 

C’est à travers l’abbé Huvelin que Charles s’est senti pour la première fois profondément aimé, accueilli. Une telle rencontre marque à jamais.

Prière pour nos pasteurs

À toutes les fois que j’entendrai maintenant parler de Charles de Foucauld, j’aurai une pensée pour son pasteur, pour celui qui l’a guidé durant toute sa vie. Invisible pour la plupart, l’abbé Huvelin réside dans le cœur même du célèbre missionnaire du désert.

En ce dimanche du Bon Pasteur, je prierai donc spécialement pour l’âme de l’abbé Huvelin, ainsi que pour mon père spirituel et tous nos pasteurs. Qu’ils soient reflets de l’amour du Christ pour l’humanité !


Laurence Godin-Tremblay

Laurence termine présentement un doctorat en philosophie. Elle enseigne également au Grand Séminaire de l’Archidiocèse de Montréal. Elle est aussi une épouse et une mère.