L’événement le plus considérable de cette rentrée littéraire est sans conteste la publication des Essais et pamphlets de Léon Bloy (1846-1917) dans l’excellente collection « Bouquins » des éditions Robert Laffont.
Cette parution vient souligner de belle manière le centenaire de la mort du Mendiant ingrat, en plus de combler une importante lacune éditoriale.
En effet, les œuvres de Bloy s’avéraient jusqu’ici difficiles à trouver ; plusieurs volumes certes avaient déjà été publiés ici et là, mais souvent chez de petits éditeurs français, dans de faibles tirages et dans des éditions de qualité très inégale auxquelles le public québécois avait rarement accès.
Maxence Caron, à qui nous devons la présente édition, a brillamment remédié à ce problème en réunissant en un seul volume de belle facture les principaux ouvrages non fictionnels de Léon Bloy.
Bloy le catholique
Ce volume est augmenté d’une préface dans laquelle le frère Augustin Laffay, archiviste de la province dominicaine de Toulouse, présente « le rhinocéros mystique » Léon Bloy en insistant sur son interprétation très particulière des Saintes Écritures et sur sa relation avec les catholiques de son temps.
C’est d’ailleurs un des grands mérites de cette édition que de ne pas chercher à tirer Bloy vers la littérature pour diminuer la part de son catholicisme, mais de le prendre pour ce qu’il a été, c’est-à-dire un écrivain contemplatif et profondément croyant qui méditait chaque jour les Livres Saints.
Quinze ouvrages sont réunis ici dans leur version intégrale, et regroupés en trois catégories : les pamphlets et la critique littéraires (Propos d’un entrepreneur de démolitions, Léon Bloy devant les cochons, Je m’accuse…, Belluaires et porchers) ; les textes dans lesquels Bloy développe sa méthode d’exégèse symbolique et sa vision de l’Histoire (Le Sang du Pauvre, Exégèse des lieux communs, Le Révélateur du globe, Le Salut par les Juifs, Le Fils de Louis XVI, L’âme de Napoléon, Jeanne d’Arc et l’Allemagne) ; les méditations sur la fin des temps et sur l’Apparition de La Salette (Méditations d’un solitaire en 1916, Dans les ténèbres, Le symbolisme de l’Apparition, Celle qui pleure).
L’absence du Pal
On peut toutefois regretter l’absence, dans ce volume pourtant intitulé Essais et pamphlets, des vitupérations du Pal, ce journal à une voix lancé en 1885 par lequel Bloy ambitionnait de se rendre insupportable à ses contemporains et dont la publication ne put être poursuivie au-delà de quatre numéros, faute de fonds.
C’est ce brûlot qui, au même titre que son roman Le Désespéré, a consacré la légende du grand pamphlétaire catholique. L’ajouter au présent volume n’aurait demandé à l’éditeur qu’une vingtaine de pages supplémentaires, et le titre retenu aurait été beaucoup plus conséquent.
Qu’à cela ne tienne, remercions les éditions Robert Laffont et Maxence Caron pour ce beau livre qui sera bientôt disponible dans les librairies du Québec.