Psaumes
Photo : Aaron Burden / Unsplash

Les Psaumes pour œuvrer à la guérison

En ces temps de pandémie, que proposent les traditions spirituelles, en l’occurrence le judaïsme, pour aider les femmes et les hommes à préserver leur santé ainsi que celle des autres, en plus de suivre toutes les recommandations gouvernementales ?

Prendre soin de sa vie et de sa santé est l’une des injonctions de la Torah. C’est ainsi que, selon la tradition orale, se comprend le verset « prenez grandement soin de vous » (Dt 4, 15).

D’autres commandements intiment aussi de se soucier d’autrui, comme l’obligation de construire un parapet autour d’un toit afin de prévenir toute chute de soi et des autres (Dt 22, 8). Et, par extension, de ne rien faire qui, par négligence, pourrait porter atteinte à la santé ou à la vie d’autrui. 

En ces temps de pandémie – qui montre une fois de plus combien tous les humains sont reliés –, il y a, dans le fait de prier ou d’étudier ensemble, une conscience collective qui se développe.

La responsabilité humaine est engagée en amont, mais également en aval, car, même s’il est écrit au sujet de Dieu « Je blesse et Je guéris » (Dt 32, 39), il n’est pas question pour la loi juive, si la maladie a frappé, de ne se fier qu’à un miracle ou de ne point se tourner vers un médecin.

Il s’agit… d’agir, se préoccuper de sa santé, préserver celle des autres, consulter un docteur et, bien évidemment, suivre sur tous les plans les consignes gouvernementales en cas d’épidémie. D’ailleurs, le Talmud cite déjà, dans l’Antiquité, des cas de confinement et le fait de s’y conformer.

Aider les malades et ceux qui les aident

Mais la tradition juive insiste sur le soutien physique et moral ainsi que sur la force de la prière pour accompagner une guérison.

La visite aux malades (sauf en temps de confinement) et l’aide à leur apporter sont privilégiées de nombreuses façons : prises de nouvelles, paroles de réconfort, services rendus à celles et ceux qui souffrent ou aux aidants naturels comme faire les courses, donner un coup de pouce, etc. Mille-et-une manières de s’impliquer dont les nombreuses initiatives publiques ou anonymes témoignent ici au Québec, toutes communautés confondues.

Quant à la prière pour une demande de guérison ou d’allègement d’une situation, elle est soulignée de diverses manières tant à l’échelle individuelle que collective. Plusieurs moments y sont consacrés dans le cadre des prières juives quotidiennes et par la lecture des Psaumes. 

Quelles sont les prières ?

Dans la prière dite des « dix-huit bénédictions », qui se récitent trois fois par jour, la huitième d’entre elles est consacrée à une supplique de guérison : « Apporte-nous un remède […] pour toutes nos douleurs et blessures ». Et on peut même murmurer à ce moment-là le prénom des personnes avec celui de leurs mères dont on souhaite la guérison, y compris soi-même. 

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Gerard van Honthorst, Le roi David chantant les Psaumes à la harpe. Image : Wikimedia Commons

Cette habitude de nommer la mère a été prise en référence à l’une des allusions du roi David dans sa supplication exprimée dans le psaume 116, verset 16. Et lors de la reprise de ce passage par le chantre durant l’office, les fidèles peuvent à nouveau répéter leurs demandes. 

Il y a là l’espérance que la prière, aussi nommée « service du cœur », pourrait influer sur les décisions célestes ou le cours de choses. N’est-ce pas ce que l’on apprend d’un autre psaume, où des malheureux pris dans une tempête « crièrent vers l’Éternel dans leur détresse […] et Il transforma l’ouragan en une brise légère » (107, 28 et 29) ?

Les Psaumes à la rescousse

Rien de ce qui est humain n’a été étranger à David à qui la tradition juive attribue la paternité de la majorité des Psaumes. Ceux-ci tiennent une place particulière dans le monde des prières juives et chrétiennes. 

Dans la liturgie, ils sont souvent cités partiellement ou intégralement, mais il est conseillé de les réciter régulièrement, voire quotidiennement, ou plus spécifiquement en lien avec une requête. 

Ainsi, par transmission des rabbins, l’on connait les psaumes qui sont dédiés à des demandes de guérison. À titre d’exemple, citons le psaume 91, « Tu n’auras pas à craindre l’épidémie » (verset 6), et pour renforcer la foi, le 23, dans lequel se trouve ce verset célèbre, « L’Éternel est mon berger, je ne manquerai de rien » (1) ; le 30, 3, « Éternel mon Dieu, je T’ai invoqué et Tu m’as guéri » ou le psaume 142 : « Je crie vers toi Éternel, je dis : c’est toi qui es mon abri, mon lot sur la terre des vivants » (6). 

Il y a aussi le psaume 119 qui comprend plusieurs versets suivant l’alphabet. On récite alors à chaque fois les versets correspondant aux lettres du prénom de la personne pour laquelle on prie.

On perçoit plus d’une fois dans les demandes du roi David comme une négociation qui s’avère être un engagement : une guérison pour mieux servir l’Éternel et contribuer ainsi en principe à une meilleure humanité. « Aie pitié de moi Éternel, car je suis abattu, Guéris-moi Éternel, car mes membres sont en désarroi […] Dans le shéol [séjour des morts] qui te rend hommage ? » (Psaume 6, 3 et 6)

La force de la prière collective

On peut également demander qu’un cours soit dédié à la guérison d’une ou de plusieurs personnes par le mérite de ces femmes et de ces hommes qui se réunissent et étudient la Bible. 

En ces temps de pandémie – qui montre une fois de plus combien tous les humains sont reliés –, il y a, dans le fait de prier ou d’étudier ensemble, une conscience collective qui se développe. 

Et même si la guérison tarde, que nos prières ne sont pas entendues, la tradition juive demande de poursuivre nos efforts jusqu’au bout !

Ces prières sont orientées aussi pour celles et ceux qui accompagnent les malades, les aidants naturels et le personnel soignant, comme le propose cette bénédiction quotidienne du matin : « Béni sois-tu l’Éternel, notre Dieu, Roi du monde, qui donne de la force à ceux qui sont fatigués ».

Cette reconnaissance à l’égard de toute personne se dévouant pour le bien dans tout domaine que ce soit est l’un des principes majeurs de l’éthique juive.


Sonia Sarah Lipsyc

Sociologue, conférencière, auteure et dramaturge, Sonia Sarah Lipsyc est également la fondatrice de Ora-Connaissance du judaisme et chercheuse associée à l'Institut d'études juives de l'Université Concordia. Le Verbe lui a demandé de puiser dans les trésors de son héritage juif pour éclairer notre monde contemporain.