surdité
Photo: Catherine Aubin

La surdité cardiaque, bien pire que la Covid

Un texte de Catherine Aubin.

« Ça va bien aller » ; cette expression nous la voyons écrite sur les fenêtres de nos maisons ornées d’un élégant arc-en-ciel. Cependant interrogeons-nous : le « ça » que désigne-t-il au juste ? Vous ? Moi ? Nous ? La société ? Notre pays ?  Notre monde ?

Ouvre-toi !

Jésus dans l’Évangile aurait-il dit aux lépreux, à l’aveugle, à la femme courbée : « Ça va bien aller » ?  Je n’en suis pas certaine. En général, ses paroles fermes et vigoureuses éveillent et déplacent nos certitudes ou illusions. Elles nous provoquent au plus profond de nous. Laissons-nous donc prendre par une expression suffisamment puissante pour être retenue depuis 2000 ans dans la langue maternelle de Jésus, l’araméen : « Effata, ouvre-toi »    

Cette parole est prononcée par Jésus alors qu’il s’adresse à un sourd qui ne peux plus communiquer. Il le prend à part, loin du regard des hommes et il met les doigts dans ses oreilles et avec de la salive, lui touche la langue et les yeux levés vers le ciel après un long soupir, il lui dit « Effata, Ouvre-toi ». Alors, tout en lui s’ouvra : oreilles, langues et paroles.

Quelles sont nos surdités ?

Nous sommes ce sourd, nous, les destinataires de cette parole. Quelles sont nos surdités ? Entendons-nous réellement ce qui se passe autour de nous, en nous et chez les autres ? Notre écoute est-elle accueillante, réceptive, et structurante ? Ou bien sommes-nous plongés dans d’autres bruits, casques vissés sur nos oreilles pour ne pas entendre un bruit ou une parole provoquante ou étrangère ? Laissons-nous saisir par le fait que cette surdité que le Christ veut soigner, est signe d’une maladie plus difficile à guérir que la Covid, plus difficile à déceler qu’un cancer. Cette surdité dont nous sommes tous atteints est celle du cœur. 

En effet cette profonde et viscérale affection s’appelle la « surdité cardiaque », la surdité des oreilles intérieures, la surdité du cœur profond. En effet notre cœur est aux prises avec une maladie grave : la dureté et la sécheresse. Fermé sur lui, il reste en suspens, comme réduit à un simple mouvement d’inspiration et d’expiration. Alors qu’il n’a subi aucune anesthésie, il ne sent plus rien et ne réagit plus à l’amour, aux larmes ou à la détresse. Sans émotion ni tendresse, il est tenté de ne plus se laisser émouvoir, secouer ou attendrir par une parole de Vie. En cela le risque de cette période de confinement est de nous rendre sourd.

Reprendre souffle

Qu’est ce qui doit s’ouvrir ? Les bars ? Les restaurants et les hôtels ? Ils sont fermés pour encore un bon moment. Leur fermeture conditionne-t-elle la nôtre ? Devons-nous suivre ce même mouvement ? A savoir : se fermer ? Se renfermer, avec portes et fenêtres verrouillées à l’extérieur et à l’intérieur ? 

« Effata » soupire le Christ à l’égard de chacun de nous, ouvre-toi, nous dit-il, car sinon tu risques de t’asphyxier, de ne plus te sentir vivant, heureux et fécond. Ouvre-toi avec ton regard, tes oreilles et tes bras, élargis ton horizon et agrandis ta perspective. En d’autres mots dégage-toi de toi-même, sors de ton anxiété et de tes doutes, respire, reprends souffle, accueille LE Souffle et le Vent qui viennent d’En-haut. C’est cet air nouveau qui te va te remettre dans ton axe, dans ta créativité et ta fécondité. Alors, oui ; si tu t’ouvres ainsi : « ça va bien aller »