Valoristes
Photo : Véronique Demers

Les Valoristes, ces travailleurs de l’ombre

De Québec à Montréal, en passant par Vancouver et plusieurs villes du monde entier, les Valoristes parcourent les rues à la recherche de contenants consignés. Le revenu d’appoint qu’ils tirent de ce butin leur permet d’acheter une gâterie, qui est banale pour plusieurs d’entre nous, comme un cornet de crème glacée sous le soleil plombant où le mercure affiche 28 degrés Celsius. J’en ai rencontré quelques-uns, à Québec et à Montréal, pour mieux les connaitre.

Ils s’appellent notamment François, Jean-Paul, Linda et Lise. La majorité sont dans la soixantaine, l’un d’eux est dans la trentaine. Ils n’ont pas eu la vie facile ; depuis des années, ils reçoivent tous des prestations d’aide sociale. Certains d’entre eux ont même une contrainte sévère à l’emploi.

Lise, dans la mi-soixantaine, se promène avec sa canne et son petit charriot, dans lequel elle empile les contenants consignés. Elle avance avec courage, malgré l’arthrose qui ronge son corps depuis des décennies. « Mon médecin m’a diagnostiqué ça alors que je n’avais même pas 20 ans », témoigne-t-elle. « Peu de temps après, j’ai obtenu le statut de contrainte sévère à l’emploi », ajoute-t-elle. 

Au début, Lise était gênée de faire la collecte de canettes et de bouteilles. Elle se souciait du regard des gens. « Ça n’a pas duré longtemps. Si je trouve un 10 $ par terre, je vais le ramasser ! C’est la même chose pour les contenants consignés », dit-elle.

À Québec, Lise et les autres Valoristes sont accueillis à l’Ilôt fleurie, sous les bretelles de l’autoroute Dufferin-Montmorency. Pendant la saison estivale et jusqu’en octobre, des bénévoles reprennent les contenants consignés de ces travailleurs de l’ombre, afin de les stocker dans un conteneur maritime. Après deux ans de rodage, en 2018 et 2019, Les Valoristes Québec sont devenus officiellement un OBNL au printemps 2020. 

La consigne davantage reconnue

À Montréal, les Valoristes forment une coopérative de solidarité. Depuis le début, les Valoristes de Montréal avaient un point de dépôt saisonnier sous le pont Jacques-Cartier, mais en novembre 2020, ils ont eu une subvention importante qui leur a permis d’avoir un point de dépôt permanent, à l’ancienne gare Terminus voyageur.

Comme quoi les conditions de ces travailleurs de l’ombre s’améliorent. Des subventions sont consenties pour reconnaitre l’apport important qu’ils fournissent, en détournant du dépotoir chaque année des centaines de milliers de contenants consignés.

D’ailleurs, à l’automne 2022, le gouvernement provincial prévoit moderniser la Loi sur la consigne. Cette loi n’a pas changé depuis sa mise en vigueur, en 1984. Pour les Valoristes, cela implique une consigne élargie, incluant entre autres les bouteilles de vin, les canettes de cidre et les bouteilles de kombucha.

Il n’y a pas que le gouvernement et les Valoristes qui veillent à valoriser le verre, l’aluminium et la plastique dont sont constitués les contenants consignés. Un épicier à Granby a décidé de son propre chef d’aménager un local dédié spécifiquement à la consigne, aux côtés de son supermarché. Ce projet-pilote devrait d’ailleurs faire des petits ailleurs au Québec. 

Pour en savoir plus : 

Les Valoristes, un balado de six épisodes, est sorti depuis octobre 2021.

Ce balado met en lumière les Valoristes, mais aussi tous les intervenants prenant part au système de la consigne, comme les brasseurs, les détaillants alimentaires et aussi quelques politiciens activement impliqués dans le dossier.

Véronique Demers

Véronique Demers est passionnée d'écriture depuis sa tendre enfance. Elle a exercé la carrière de journaliste pendant plus de 10 ans. Elle s'intéresse en particulier au développement personnel, au mieux-être, à la spiritualité, à la technologie et au monde du travail.