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Photo tirée de la page facebook: «Limoilou: Notre quartier, le meilleur de tous!»

Une pétition réactionnaire contre l’Angélus

Nous apprenions récemment qu’une poignée de Limoulois s’opposent à ce que l’église Saint-Fidèle sonne l’Angélus deux fois par jour. La trentaine de signataires parle d’une pollution auditive, d’un bruit excessif qui nuirait à la qualité de vie du quartier.

L’Angélus est une pratique millénaire dans l’Église catholique occidentale. En effet, le premier Angélus a été sonné en 1095 au concile de Clermont. Puis, une bulle papale de 1318 a rendu la pratique universelle dans l’Église.

Le tintement des cloches servait à la fois pour appeler les clercs à la prière et pour marquer le temps. Sans entrer dans la théologie, disons simplement que l’Angélus a fait office d’horloge du quartier pendant des siècles. Sonné traditionnellement trois fois par jour (six heures du matin, du soir et à midi), il indiquait l’heure à l’entourage.

La coutume est arrivée au Québec avec les Français : on sonnait l’Angélus dans la chapelle érigée par Samuel de Champlain!

L’argument de la laïcité

Pour en revenir à la pétition, nous devons concéder, qu’effectivement, les cloches produisent un certain volume sonore. Cet argument est cependant très discutable considérant le nombre de décibels produit par les cloches. Notons que l’Angélus le plus dérangeant des trois, celui de six heures du matin, ne sonne plus depuis belle lurette.

Le corps de l’argumentaire des signataires est donc celui de la laïcité.

Selon eux, l’Angélus n’aurait plus lieu d’être au nom de la neutralité de l’espace public. Rappelons au passage que la loi 21 n’entend pas « neutraliser » l’espace public, mais bien la prestation de service offert par les employés de l’État. Bref, les signataires de la pétition auraient intérêt à s’informer avant d’invoquer l’argument législatif…

C’est évidemment faire une abstraction totale des traditions du Québec et du rôle historique central de l’Église catholique dans le développement de notre pays.

Cet argument sert donc à camoufler une position antireligieuse bien personnelle. Sauf que le jupon dépasse amplement! La pétitionnaire précise candidement aux journalistes — et sur le site de sa pétition — qu’il s’agit pour elle d’une tradition désuète et qu’elle refuse d’entendre un son qui évoque le catholicisme.

En somme, l’on clame la neutralité de l’espace public en raison d’une antipathie individuelle.

L’initiatrice de la pétition fait même une comparaison avec le muezzine d’une mosquée pour justifier son opposition à l’Angélus.

C’est évidemment faire une abstraction totale des traditions du Québec et du rôle historique central de l’Église catholique dans le développement de notre pays. Il s’agit également d’un raccourci intellectuel qui joue grandement sur la peur de l’Islam de beaucoup de gens afin de justifier une forme de limitation du fait religieux dans l’espace public.

Une pensée totalitaire

La dame est évidemment dans son droit de ne pas adhérer à une religion en particulier. C’est la base même de la liberté de conscience et de religion que tout état démocratique garantit dans ses chartes. Invoquer la démocratie, la laïcité et la neutralité de l’état pour faire taire quelque chose qui ne nous plait pas est un non-sens.

L’Angélus est pour la vaste majorité des gens un élément patrimonial et un simple marqueur sonore du temps qui passe.

Si l’on tente d’effacer la présence d’un groupe, sous prétexte idéologique, religieux ou racial, on tombe dans une forme de pensée totalitaire qui n’a rien à voir avec l’idée de laïcité et de neutralité mise de l’avant par tout état démocratique!

Heureusement, un tel discours est ultra-minoritaire.

L’enquête journalistique nous démontre d’ailleurs que la plupart des citoyens s’opposent à l’arrêt de l’Angélus. Il y a fort à parier que peu de gens font la prière qui lui est associée à l’origine, y compris parmi les pratiquants. L’Angélus est pour la vaste majorité d’entre eux un élément patrimonial et un simple marqueur sonore du temps qui passe.

Bref, l’Angélus est encore aujourd’hui ce qu’il a toujours été pour la grande majorité des gens : l’horloge du quartier!


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Emmanuel Lamontagne

Emmanuel est historien de l'art et de l'architecture. Il se spécialise en iconographie et en architecture religieuse. Il travaille présentement dans le domaine de la conservation du patrimoine bâti.