Philanthropos
Photo : Mélissa Trépanier

L’Institut Philanthropos fête ses 20 ans d’existence!

C’est en Suisse, au cœur de la ville de Fribourg – qu’on appelle joliment la Rome francophone – que se trouve l’Institut européen d’études anthropologiques, surnommé Philanthropos. Fondé en 2003 par un groupe d’intellectuels catholiques en réponse à l’appel du pape Jean-Paul II pour la formation de la jeunesse, Philanthropos, qui fête ses 20 ans cette année, est désormais une référence en la matière et se démarque à tous les égards.

L’approche se veut intégrale en offrant une année universitaire basée sur trois piliers: intellectuel, communautaire et spirituel. L’enseignement est centré sur l’anthropologie philosophique et théologique (60 crédits) et est vécu dans un esprit fraternel, alliant théâtre, travaux manuels et jardinage. Du côté spirituel, l’Eucharistie est quotidienne, avec des temps de prière et d’adoration, une école d’oraison, et une retraite de discernement ignacienne.

«Le but est de fournir une formation intégrale, une ‘‘anthropo-praxie’’. Le travail manuel, le concret, est fondamental. De fait, l’artisanat, le jardinage et le théâtre se sont ajoutés au fil des ans. On veut que les connaissances intellectuelles s’incarnent dans la réalité et dans les relations. Nous avons vu à quel point des gens très formés intellectuellement dans l’Église pouvaient avoir été complètement déconnectés de la vraie vie, des vraies personnes – c’est ce que les cas d’abus sexuels et d’abus d’autorité révèlent, entre autres choses. À cause de cela, il est primordial que la formation soit complète», explique Thomas de Gaalon, responsable des communications à Philanthropos, lui qui a fait sa philosophie et qui est apiculteur de métier.

Anciens du Québec

Dès 2009, et jusqu’à tout récemment, plusieurs jeunes Québécois sont partis en Suisse pour vivre l’année Philanthropos. Quatre anciens ont bien voulu témoigner de leur expérience.

Membre de la cohorte de 2016, c’est le côté incarné de la formation qui a profondément marqué Louis-Joseph Gagnon.

«J’avais 19 ans et je ne savais pas en quoi m’inscrire à l’université. C’est jeune pour savoir ce que tu veux faire plus tard. L’autre aspect, c’était ma vie de foi. J’avais envie de l’approfondir. J’avais la foi de mes parents. Je voulais avoir une foi à moi, adulte. J’avais beaucoup de questionnements sur la liberté humaine, sur Jésus, l’Église. Il n’y avait rien au Québec qui pouvait répondre à tout ça, alors je suis parti là-bas avec un ami. Ce n’est qu’après plusieurs mois à l’Institut que j’ai réalisé ses bienfaits dans ma vie. Une fille m’a dit que j’étais beaucoup plus souriant qu’à mon arrivée. Quand elle m’a dit ça, j’ai réalisé bizarrement que ça faisait des jours que j’avais mal aux joues… Je souriais tout le temps! Moi, le gars toujours si sérieux! En fait, je goutais le ciel, ici-bas. Mon année a été une expérience de transfiguration. Pour la première fois, mon être tout entier était unifié.»

Après Philanthropos, Louis-Joseph s’est inscrit en théologie. C’est là qu’il a trouvé sa voie. «Je pense que je ne travaillerais pas au Verbe Médias si je n’avais pas fait ce cheminement», avoue-t-il candidement.

L’ami qui l’accompagnait, c’est Paul-Émile Durand. Lui aussi se questionnait sur sa vie. Philanthropos a confirmé sa vocation sacerdotale. «On nous a présenté plein de monde, de tous les états de vie. J’étais entouré de jeunes de mon âge qui avaient la foi – ce qui était rare au Québec. J’ai gouté à la vigueur d’une Église jeune et francophone. Ça m’a amené à voyager beaucoup après, grâce à toutes ces nouvelles amitiés. Ça m’a apporté des lumières pour vivre une vie chrétienne plénière. On m’a donné une vraie compréhension de l’intelligence de la foi. C’est devenu évident que j’avais la vocation, alors qu’avant, je doutais», dit celui qui sera ordonné diacre bientôt et qui est actuellement à la paroisse Saint-Maxim à Laval.

Expérience de rabotage

Une autre ancienne, mais de l’année 2010 cette fois, est Sarah-Christine Bourihane. Elle s’est rendue à Philanthropos juste après sa conversion et son baptême. Elle avait soif de formation tant spirituelle qu’intellectuelle. «Je me souviens qu’à notre arrivée, le directeur nous avait dit: ‘‘Vous ne savez pas pourquoi vous êtes ici. Vous pensez le savoir, mais vous verrez que vos raisons changeront. C’est une formation universitaire, certes, mais c’est toute votre personne qui sera formée.’’ Il avait tellement raison! J’ai reçu une solide formation scolaire, mais c’est qu’en plus, j’ai eu le temps et l’espace pour tout assimiler.»

Pendant cette année-là, Sarah-Christine a trouvé sa vocation de journaliste et de cinéaste. «J’ai vécu ce que j’appelle ‘‘une expérience de rabotage’’. Je me suis fait sabler! Toute la structure, le mode de vie, suscitent l’apprentissage : les pupitres disposés en cercle, les tâches ménagères, et des cours avec d’éminents professeurs venus de partout en Europe. Lors des weekends, on part où on veut, en groupe. Nous sommes allés à la canonisation de Jean-Paul II, aux JMJ de Madrid. Tout est proche! Et puis, la vie de prière à travers tout ça… J’ai vécu ma vie chrétienne en accéléré. Tu te dépasses à tous les points de vue. Pour moi, ça a été une expérience décisive», déclare la journaliste du Verbe Médias, également réalisatrice du documentaire Le rang pas drette, paru en 2019 dans le cadre du Festival de cinéma de la ville de Québec.

Une année pour Dieu

Mélissa Trépanier est sortie de Philanthropos en 2010 et considère que cette «année pour Dieu» a changé le cours de sa vie. «J’ai énormément voyagé pendant mon année là-bas: Rome, Prague, Turin, Assise. J’ai rencontré de jeunes catholiques et des professeurs incroyablement doués. Ce que j’ai retiré de plus grand de mes études là-bas, c’est le sens critique. On m’a appris à penser et à réfléchir par moi-même! Je suis revenue enflammée, prête à redonner ce que j’avais reçu. À mon retour, j’ai travaillé comme caméraman, puis journaliste, puis agente de pastorale, pour aboutir dans une Maison des jeunes. J’ai travaillé à transmettre aux jeunes l’art de l’argumentation en mettant sur pied des diners-causeries, et j’ai aussi travaillé en étroite collaboration avec Alex Deschênes, qui était de la même cohorte que la mienne, sur ce qui était à l’époque la ‘‘nouvelle’’ théologie du corps.» Mélissa a été recrutée par Xpand Canada, un organisme international en formation de leadeurs. Elle est coach de vie.

L’année Philanthropos peut être financée par des parrainages, des bourses et du travail sur place. Les conditions d’admission sont les mêmes que celles des études universitaires en Suisse.

Ce reportage a été réalisé dans le cadre d’un partenariat avec l’Institut Philantropos.

Brigitte Bédard

D’abord journaliste indépendante au tournant du siècle, Brigitte met maintenant son amour de l’écriture et des rencontres au service de la mission du Verbe médias. Après J’étais incapable d’aimer. Le Christ m’a libérée (2019, Artège), elle a fait paraitre Je me suis laissé aimer. Et l’Esprit saint m’a emportée (Artège) en 2022.