parrain et marraine
Illustration : Marie-Pier LaRose/Le Verbe

Parrain et marraine, le rôle derrière le titre

Qui n’a pas rêvé de se découvrir une fée marraine comme Cendrillon ? Ce personnage de conte pourrait-il nous dire quelque chose de ce rôle ? Disney s’est inspiré de la réalité, après tout !

En 2024, alors que les baptêmes se font plus rares, le rôle de parrain ou de marraine conserve pourtant une place de choix dans l’esprit collectif. C’est une demande qui honore encore celles et ceux qui la reçoivent. D’où nous vient un tel attachement à une figure si profondément chrétienne ?

Rose : soutenir par la prière et la présence

Depuis 25 ans déjà, elle prend soin de sa filleule et s’assure d’être présente, de près ou de loin, dans sa vie. La jeune fille peut toujours compter sur sa marraine et, surtout, Rose prie pour elle et témoigne de sa foi aussi souvent que possible. «Je suis présente avec mon mari en union de prière, en accompagnement dans nos pensées, dans notre désir de soutenir sa vie». Les nouvelles prises régulièrement, le soutien aux parents, les coups de fil ou les petites visites par-ci par-là sont autant d’engagements qui maintiennent vivante la relation. Pour qu’assister aux grands évènements de la vie de sa filleule ait un sens, elle tient à manifester sa présence tout au long du chemin.

«Je pense qu’un parrain et une marraine, ça s’imbrique aussi dans tout le contexte familial». Pour elle, la relation nouée avec sa filleule dépend bien sûr de l’enfant, mais aussi de l’ouverture de ses parents à laisser cet espace relationnel privilégié se créer. Cela demande de reconnaitre que «comme parent, on ne peut pas tout apporter à ses enfants. […] Lorsqu’il y a un éloignement physique, le lien tient d’autant plus par la volonté commune des parents et des parrains/marraines de s’investir. Sinon, il s’effrite.»

Pour la mère de 5 enfants, et maintenant heureuse grand-mère de plusieurs petits-enfants, choisir un parrain et une marraine pour son enfant, «c’est comme accueillir un autre membre dans ta famille».

Et qu’en est-il des parrains/marraines plus «vieux»? Pour leur dernier enfant, Rose et son mari ont fait le choix de demander à la grand-mère de ce dernier. «Tout le monde nous disait: ‘’Et quand elle va mourir?’’». Cela ne les a pas empêchés de faire ce choix fort de sens pour eux. «Moi je crois beaucoup au fait que même décédée, elle peut intervenir dans sa vie. C’était quelqu’un de signifiant pour mon fils ». Soutenir la foi d’un enfant peut se faire de différentes manières et l’intercession n’est certainement pas la moindre !

Marc-Antoine : le parrain, figure paternelle de surcroit

Marc-Antoine est l’heureux papa d’Auguste, presque 2 ans. Sitôt la nouvelle de la grossesse reçue, il appelle son meilleur ami pour partager avec lui sa joie et lui annoncer: « Tu vas être parrain » !

Avant même la conception, les «candidats potentiels» étaient dans le collimateur. Le naturel de cette démarche lui vient de sa propre expérience. «J’ai gardé une très bonne relation avec ma marraine, et ce, malgré la distance, car elle vit à Paris». Son attachement dépasse largement l’image de la marraine qu’on attend avec des cadeaux lors des fêtes.  «Jeune, chacun de mes trois frères et sœurs avait une relation avec son parrain/marraine respectif. En grandissant, j’ai lié des amitiés intergénérationnelles avec eux».

Ce que chérit le plus Marc-Antoine, c’est la «relation significative hors de la famille» qu’offre un parrain et une marraine. «D’un point de vue personnel, ça me rapproche de mon meilleur ami. Et ça rend encore plus important son rôle de parrain».

Comment choisir ?

Pour Marc-Antoine, un bon parrain est une figure significative «paternelle», différente de lui. «C’est un rôle qui peut très largement évoluer. C’est à mon ami de définir comment il se sent à l’aise d’intégrer ce rôle et ce sera aussi à Auguste de le définir».

Un parrain/marraine, c’est aussi un «refuge». «J’ai cette image d’Auguste, adolescent, fâché contre moi, son père, qui s’en va dormir chez son parrain. Benjamin, le parrain, c’est une personne différente de moi, dans ses valeurs et ses habitudes ». Donner un autre modèle masculin à Auguste est important pour Marc-Antoine. Cela peut même «combler un peu le vide» des qualités qu’il ne posséde pas.

Pour Rose, il est primordial que les parents prennent le temps d’exposer leurs attentes, car le rôle qu’acceptent les parrains/marraines dépend de celles-ci. Le choix vient aussi d’un élan commun et de valeurs qui se rencontrent, d’une relation profonde en lien avec la foi, mais aussi au-delà. «Quand ce couple d’amis m’a demandé, à moi, d’être la marraine, c’est parce qu’on avait une complicité au niveau de notre foi, de notre engagement, chrétien, mais aussi de notre engagement social. Nous avions des valeurs communes. Et c’est ce qui nous interpelait tous, notre façon de vivre».

Un rôle d’une grande valeur dès son origine

Dans les premiers siècles de l’Église, lorsque les chrétiens risquaient leur vie en se dévoilant, le parrain se portait garant du sérieux de la démarche du converti demandant le baptême. Il devenait ainsi, et pour de nombreuses années, un témoin et un mentor dans le cheminement de foi de son protégé.

Avec la christianisation des sociétés, le baptême est venu de plus en plus tôt dans les étapes de vie, notamment à cause de la mortalité infantile. Le parrain ou la marraine prenaient également la responsabilité de l’enfant dans le cas du décès des parents. Plus qu’un rôle, c’était une importante responsabilité.

Selon un document de l’Assemblée des évêques catholiques du Québec, le rôle du parrain ou de la marraine se résume en trois points : accompagner sur la route de la vie, témoigner de la foi chrétienne et bâtir des ponts avec la communauté chrétienne. Dans sa signification spirituelle, le parrain ou la marraine incarne le prolongement et l’élargissement de la famille. À titre de «parents spirituels», ceux-ci ont pour mission d’ouvrir l’enfant ou l’adulte en chemin dans la foi à la grande communauté chrétienne.

Pour devenir parrain ou marraine dans le rite catholique romain, l’Église demande aux adultes d’être confirmés. Comment, en effet, se porter garant d’une foi qui serait inconnue ? C’est d’ailleurs un motif courant dans les groupes de catéchumènes, car plusieurs baptisés y cheminent en vue de la confirmation dans le but d’être parrain ou marraine d’un enfant qui sera baptisé. On pourrait s’interroger sur les motivations de l’Église à accepter de confier ce rôle à des non pratiquants, mais refuser irait à l’encontre de son appel premier à être missionnaire. En effet, plusieurs paroisses considèrent que ces parcours de confirmation, quels que soient les motivations des personnes qui les empruntent, sont des occasions de rencontre avec le Christ à ne pas négliger.

Ainsi, pour plusieurs croyants aujourd’hui, ce rôle est davantage perçu comme une figure de soutien et d’accompagnement pour l’enfant qui vit une «nouvelle naissance» dans les fonts baptismaux. Avec les parents, les parrains et marraines s’engagent auprès de l’enfant à le guider sur le chemin d’une authentique vie chrétienne.

Marie-Jeanne Fontaine

Diplômée en sexologie, Marie-Jeanne chante, jase et écrit. Femme de cœur (elle essaye !), elle trace sa petite route dans le Grand Large du Bon Dieu. Vous la trouverez devant son piano ou dans sa cour arrière, au soleil, en train de faire fleurir ses idées entre deux éclats de rire et un café.