Photo : Laurence Lemieux/Holos

«Courir pour Noah»: Courir pour aimer plus

Le documentaire de 60 minutes Courir pour Noah retrace les 690 km parcourus en sept jours par Marc-Antoine Forand pour les sept ans de son fils. Lui qui était plutôt sédentaire, sa détermination à devenir un marathonien étonne. Mais ce qui émerveille davantage, c’est le papa derrière le coureur. Courir pour Noah est un éloge à l’amour d’un père pour son fils atteint de trisomie 21.

L’histoire commence à New York, le 21 mars 2022, journée mondiale de la trisomie 21. Dans la ville qui ne dort jamais, Marc-Antoine s’élance avant le lever du jour, espadrilles de course aux pieds, le cœur léger devant l’aventure qui nait. Les quelques coureurs qu’il croise dans le Central Park ne se doutent pas qu’il se rendra… jusqu’à Bromont. Et encore moins du motif pour lequel il se lance dans cette folle entreprise.

« Il y a plus de sept ans, si on m’avait dit que j’aurais eu un fils trisomique et que je l’aurais accueilli avec bonheur, je ne l’aurais pas cru. Et encore moins que je serais devenu un marathonien pour la cause, moi qui n’avais jamais couru plus d’un kilomètre », s’exclame sur scène le papa en avant-première du film, aux côtés de sa femme Carolanne et de leur fils Noah.

En juin 2016, après la naissance de Noah, leur premier enfant, le diagnostic tombe. C’est un choc pour les nouveaux parents, mais ils décident immédiatement de l’encaisser. Ils accueillent sans condition cette petite vie dans leur bras, comme elle est, comme elle sera, sans reculer.

D’ailleurs, dans ses courses, rien n’arrête Marc-Antoine. Au départ, le jogging était une échappatoire. Rapidement, il s’est transformé en mission pour transmettre un message à son fils: les limites ne doivent pas être un obstacle pour avancer dans la vie.

Dans les hauts comme dans les bas

Le réalisateur du film, Samuel T. Scofy, avait déjà réalisé deux courts-métrages documentaires sur le sport. Si Courir pour Noah se concentre principalement sur le défi sportif, il va plus loin. « Une grosse partie du film est sur la course, mais c’est vraiment secondaire comme thématique, ce n’est pas le filon premier. C’est pourquoi le côté humain, c’est ce qui commence et finit le film. »

C’est par l’entremise de sa compagnie HOLOS – une entreprise de déjeuners sur le pouce, dont il est le cofondateur – que le réalisateur entre en contact avec la famille Forand. Samuel est touché par leur histoire, et eux acceptent de la livrer à cœur ouvert devant l’objectif.

« Même si ce n’est pas toujours rose, Noah nous fait voir le monde avec d’autres yeux. Il nous en apprend sur la beauté intérieure,
car lui, il la voit dans chacun. »

« Je m’occupe de tout », dit d’emblée Samuel à Marc-Antoine, lui assurant son soutien comme commanditaire et organisateur de ses 17 marathons en plus de porter le chapeau de réalisateur. En VR, l’équipe suit de près le coureur dans l’obscurité, les intempéries, le manque de sommeil ou les douleurs lancinantes aux pieds qui ne veulent plus avancer.

Les plans panoramiques montrent Marc-Antoine seul, face à lui-même, perdu sur les longues routes de campagne. Les plans parfois instables, pris sur le vif, rappellent tout le caractère imprévisible d’une course. « Il y a plus de plans qui shakent que j’aurais pensé, d’autres où il n’y avait pas assez de lumière. La beauté du documentaire, c’est d’être imparfait et ça balance le côté cinématographique plus raffiné. »

Que ce soit par la musique de Jean-Michel Blais ou par des compositions originales, on accompagne Marc-Antoine dans ses plus hautes exaltations comme dans ses plus creux retranchements.

« Marc-Antoine avait toujours le sourire après chaque course, sauf un soir. Il ne nous regardait pas, ne voulait pas qu’on le filme. Nous l’avons gardé au montage, car ça symbolisait le défi de son parcours », confie sur la scène le réalisateur.

Par et pour un autre

En avant-première, avant la projection, Noah est entouré de ses grands-parents, de ses oncles et de ses tantes, de ses cousins. Le petit rassemble, il suscite le don de soi. Si elle n’avait pas de communauté pour la soutenir, la famille Forand n’en serait pas là, admet-elle. Derrière tout ce monde assemblé dans le hall du Musée de la civilisation, je lis sur l’affiche du film : « L’amour est sans bornes. »

Photo : Vincent Bombardier/Holos

À travers ce défi, Samuel y voit la force de l’amour, décrite par les mots de Nothing is impossible, une des chansons du film qu’il a composée. « Il y a une dimension qui va plus loin que le physique et le mental, pense-t-il. L’amour est une dimension de plus qu’on ne voit pas. »

Le film montre que, pour un autre, il est possible d’accomplir de grandes choses. Vécus dans la perspective du don, les efforts du parcours ne comptent plus autant, même quand ils se chiffrent en kilomètres. C’est surtout le chemin intérieur qui l’emporte sur la douleur des ampoules.

Finalement, on comprend aussi que c’est par un autre que Marc-Antoine court. Noah l’inspire, surtout lorsqu’il ne se sent plus la force de continuer. « Plus Noah grandissait et plus il m’inspirait. Plus il m’inspirait, plus je voulais me dépasser. Les kilomètres et les défis se sont allongés au fil du temps », me confie Marc-Antoine.

Noah, qui a défié les pronostics médicaux les plus pessimistes, ne cesse de le surprendre : du haut de ses sept ans, il accompagne son papa en montagne, il court, fait du vélo et de la natation, alors qu’on en prédisait l’impossibilité.

Par ce film, les parents veulent rendre hommage à la différence et aider aussi les parents d’enfants trisomiques à voir le bon côté des choses. À ce jour, au fil de ses défis, Marc-Antoine a amassé 50 000 $ qu’il a distribué à des organismes œuvrant pour la cause.

« Même si ce n’est pas toujours rose, Noah nous fait voir le monde avec d’autres yeux. Il nous en apprend sur la beauté intérieure, car lui, il la voit dans chacun. Il ne se met pas de filtre comme nous, sourit parce qu’il faut faire un sourire. Il aime ou il n’aime pas, c’est comme ça, il est dans la vérité pure. »

Courir pour Noah est disponible gratuitement le 15 octobre à 18 h 00, sur la chaine de Holos film.

Sarah-Christine Bourihane

Sarah-Christine Bourihane figure parmi les plus anciennes collaboratrices du Verbe médias ! Elle est formée en théologie, en philosophie et en journalisme. En 2024, elle remporte le prix international Père-Jacques-Hamel pour son travail en faveur de la paix et du dialogue.