athéisme
Illustration: Marie-Pier LaRose/Le Verbe

L’athéisme peut-il être rationnel ?

Lorsqu’on rencontre une personne qui croit en Dieu, il est naturel de se demander quelles sont ses raisons de croire. Et c’est très bien parce qu’on ne veut pas d’une croyance irrationnelle !

Ce questionnement nous amène trop souvent cependant à oublier l’attitude inverse, qui n’est pas moins importante et nécessaire : l’athéisme peut-il être raisonnable ?

Il y a un piège qui est trop répandu de nos jours et qu’il nous faut éviter : penser que seul celui qui croit en Dieu doit avoir des raisons pour appuyer sa croyance.

Non, peu importe ce qu’on croit, il nous faut des raisons de croire. Qu’on soutienne que Dieu existe ou qu’on le nie, il nous faut une justification. Quelle que soit notre croyance, nous sommes tous dans le même bateau. Si on ne vit pas selon notre raison, alors notre vie est sans raison.

Plus encore, contrairement à ce que plusieurs pensent aujourd’hui, l’athéisme est loin d’aller de soi. Non seulement la majorité de l’humanité aujourd’hui croit en Dieu, mais l’histoire nous montre que l’athéisme est un phénomène minoritaire. Attention! Je ne dis pas que ce fait est la preuve irréfutable que Dieu existe. La propension à croire en Dieu est plutôt le signe que l’athéisme n’est pas évident et qu’il doit être justifié.

Bref, l’athéisme ne peut pas être raisonnable s’il est sans raison.

Bien connaitre Dieu

Pour que l’athée puisse justifier sa croyance, il a deux avenues : réfuter les arguments apportés en faveur de l’existence de Dieu ou chercher des arguments en faveur de l’inexistence de Dieu.

De fait, l’athéisme ne peut pas être raisonnable s’il existe de bonnes raisons de croire que Dieu existe. Il en va ici comme ailleurs : quelqu’un ne pourrait pas raisonnablement nier le réchauffement climatique sans d’abord réfuter les arguments qui soutiennent cette croyance.

S’il a de bonnes raisons de croire que Dieu n’existe pas, l’athée aura une croyance plus raisonnable. Ici encore, l’athée est dans une situation semblable à celle du climatosceptique : la position de ce dernier sera plus raisonnable s’il peut prouver l’inexistence du réchauffement climatique.

Attention! Il ne suffit pas d’apporter des arguments pour qu’une croyance soit raisonnable. Il faut encore que ces derniers soient bons! En ce sens, il existe une condition indispensable pour celui qui veut bien défendre l’athéisme : il doit bien connaitre le Dieu qu’il rejette.

Cela peut sembler banal ou évident pour certains. Malheureusement, lorsqu’on lit des athées – même certains très réputés comme Richard Dawkins – on voit que cette condition est loin d’aller de soi.

L’athée ne peut pas avoir une opinion raisonnable s’il n’étudie pas sérieusement et humblement la croyance en Dieu et les meilleurs arguments en sa faveur. Si quelqu’un veut nier une croyance, son premier devoir est de bien connaitre cette croyance et ses justifications. Et comment pourrait-on bien connaitre ce que pense quelqu’un sans une étude sérieuse et humble de ce qu’elle dit ? Imaginez un climatosceptique qui n’aurait pas sérieusement et humblement étudié les recherches qui défendent l’existence d’un réchauffement climatique… On ne pourrait pas dire qu’une telle position est raisonnable!

En un sens, cette condition s’applique aussi à celui qui croit en Dieu. Une croyance est toujours plus raisonnable lorsqu’elle prend bien en compte la position qui s’y oppose. En revanche, on oublie trop souvent qu’il est encore plus essentiel pour l’athée de bien comprendre celui qui croit en Dieu.

Un athéisme raisonnable ?

L’athéisme est essentiellement un refus ou une négation de Dieu. C’est pourquoi l’athéisme est incompréhensible et inexistant sans son rapport à la croyance qu’il rejette.

Une opposition, quelle qu’elle soit, suppose toujours quelque chose à quoi on s’oppose. Pas de climatosceptique sans l’idée et la défense d’un réchauffement climatique. De même, pas d’athéisme sans une certaine croyance et défense de Dieu. Sous peine d’être profondément déraisonnable, l’athée doit nécessairement avoir une bonne connaissance du Dieu qu’il nie.

Finalement, l’athéisme peut-il être raisonnable ?

Moi-même, je ne suis plus athée et je pense que si on suit l’expérience et la raison jusqu’au bout, c’est à Dieu qu’ils nous conduisent. En ce sens, je ne pense pas que l’athéisme soit raisonnable.

Cependant, dans la mesure où une personne s’interroge sur ses raisons d’être athée et qu’elle cherche sérieusement et humblement à comprendre la croyance qu’elle refuse, on peut parler d’un athéisme raisonnable.

Ici, ce n’est pas l’athéisme que je veux défendre ou encourager, mais plutôt la démarche raisonnable et humble. Comme le dit bien Pascal :

 Il n’y a que deux sortes de personnes qu’on puisse appeler raisonnables : ou ceux qui servent Dieu de tout leur cœur parce qu’ils le connaissent, ou ceux qui le cherchent de tout leur cœur parce qu’ils ne le connaissent pas. 

Pascal, Pensées, Éd. Michel Le Guern, fragment 398

Jean-Philippe Murray

Jean-Philippe a étudié la philosophie à l’Université Laval. Il est ensuite entré au séminaire où il chemine présentement pour devenir prêtre. Il ne cesse pas d’être attiré par la Vérité qu’il cherche avec passion et embrasse partout où il peut la trouver.