The Nun II
Photo: Bruno Calvo/Warner Bros Picture

The Nun II : l’Église du côté des héros

Les films portant sur l’exorcisme sont généralement des succès commerciaux, et ce, même s’ils disposent généralement de budgets plus modestes que les plus grandes productions hollywoodiennes. À une époque marquée par une forte sécularisation, notamment au Québec, bon nombre de cinéphiles se montrent pourtant toujours avides de ces histoires où Satan et ses suppôts sont combattus par de simples mortels, en particulier des prêtres catholiques. L’adage « chassez le naturel, il revient au galop » s’applique ainsi à l’univers religieux : « Chassez le SURnaturel, il revient au galop ».

Le film The Nun II s’inscrit dans cette tradition. Il fait suite au film The Nun qui se situe dans l’univers cinématographique de La Conjuration (The Conjuring en anglais).

Au moment d’écrire ces lignes, la production occupe la tête du boxoffice nord-américain pour une troisième fin de semaine depuis sa sortie dans les salles de cinéma le 8 septembre. Elle a déjà généré plus de 200 millions de dollars américains en recettes et est déjà considérée comme un succès planétaire.

Mais contrairement à bon nombre de films sur l’exorcisme, où le personnage principal est un prêtre, cette fois-ci, c’est une religieuse qui fait figure d’héroïne principale.

Dans le premier opus, The Nun, le Vatican fait appel à un prêtre, le père Burke, et à une religieuse, sœur Irène, pour enquêter sur le mystère entourant le décès mystérieux d’une moniale en Roumanie, enquête qui les conduira à affronter et à chasser du monastère un démon du nom de Valak.

Dans The Nun II, les autorités ecclésiastiques, craignant le retour de Valak, font de nouveau appel à sœur Irène, mais sans le père Burke cette fois-ci, pour se pencher sur une série de décès violents impliquant des prêtres et des religieuses. Ses recherches la mèneront en France où, aidée notamment d’une novice, sœur Debra, elle croisera une fois de plus la route de Valak.

Sortir de la caricature

Comme tout film se situant dans la catégorie « horreur » ou « thriller », The Nun II tient le téléspectateur en haleine du début à la fin.

Cela dit, plus qu’un simple film d’horreur, cette production se réfère largement à l’univers de la foi catholique par diverses évocations y jouant un rôle central. Il est notamment question de reliques saintes, de foi en l’eucharistie et de la force de la prière.

Par ailleurs, l’actrice Taïssa Farmiga incarne très bien son rôle de sœur Irène, une religieuse attachante et touchante par son humanité, sa maitrise d’elle-même, et surtout, son courage. Par obéissance envers les autorités de l’Église et par souci d’aider le monde, elle accepte la mission qui lui est confiée, sachant les risques qu’elle encourt à se lancer à la poursuite du démon Valak.

À une époque où l’Église est souvent malmenée dans les médias, à tort ou à raison, un film où l’Église fait clairement partie des « bons » et des « héros », sans ambigüité, est une heureuse surprise.

Cela ne veut pas dire pour autant que d’un point de vue théologique, tout y est parfait. Le récit a évidemment sa part d’exagérations, d’inexactitudes et d’inventions théologiques, sans doute pour soutenir l’intrigue de cette œuvre cinématographique fictive. Il ne faut donc pas y chercher une catéchèse explicite. Un chrétien averti saura faire la part des choses.

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Quel bien tirer d’un film d’horreur?

L’intérêt du film réside davantage dans son effet (possible) chez les personnes plus ou moins éloignées de l’Église ou de la foi chrétienne. Par ses personnages si héroïques, féminins de surcroit, appartenant explicitement à l’Église et travaillant ouvertement à bannir le mal, ce film permet de sortir de certaines images caricaturales dans lesquelles le cinéma enferme parfois les personnages à vocation religieuse : le prélat hautain, la religieuse sévère et méprisante, etc. The Nun II parvient donc à proposer une image somme toute positive de l’Église et de ses représentants.

Par ailleurs, même pour les croyants, ce film permet de se questionner. En touchant à l’univers de l’exorcisme, il nous fait réfléchir sur la place du surnaturel dans notre foi. Même si l’affrontement entre sœur Irène et le démon Valak évoque davantage une certaine perception hollywoodienne de ces réalités, imprégnée d’un sensationnalisme qui n’a souvent rien à voir avec le ministère réel des exorcistes, il n’en demeure pas moins qu’il rappelle la part de combat spirituel dans toute vie chrétienne.

Du reste, les exorcistes le diront, les vrais cas de possession démoniaque sont rares. Dans le quotidien de nos vies, c’est davantage par le moyen des tentations que nous sommes amenés sur le terrain du combat spirituel.

Lamphone Phonevilay

Lamphone Phonevilay est frère dominicain. Il a étudié la théologie à l'Université de Montréal et la sociologie à l'EHESS de Paris. Il fait présentement une thèse de doctorat en théologie spirituelle sur sainte Catherine de Sienne au Collège Universitaire Dominicain d'Ottawa. S'intéressant autant à la mystique qu'à la sociologie, il avoue avoir une passion pour... la musique électronique!