couples et familles
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Phares de nuit : accompagnement pour couples et familles

Au sein de l’Église catholique du Québec, plusieurs mouvements proposent aux hommes et aux femmes (mariés, séparés, divorcés ou conjoints de fait) une forme de vie spirituelle et communautaire. Ces groupes empruntent des avenues différentes pour appuyer le couple et la famille dans leur vie quotidienne et dans leur cheminement de foi. Certains mouvements axent leurs interventions à la fois sur la relation de couple et sur la spiritualité, tandis que d’autres veulent aider les familles de manière plus générale à vivre bien ancrées dans le Seigneur.

Animées par des laïcs et appuyées par des consacrés, ces organisations sont présentes dans tous les diocèses de la province. Certaines sont de petites associations locales de fidèles, tandis que d’autres rayonnent dans plusieurs pays.

Le Verbe a rencontré trois laïcs, à savoir un couple et un père de famille, qui président à la destinée de deux de ces mouvements trop souvent méconnus.

Cana

Dans la Maison communautaire Val-de-Paix, tenue par la Communauté du Chemin neuf, à Rawdon, une vingtaine de couples, fourbus mais heureux, donnent un dernier coup de main aux responsables afin de tout ranger, de tout nettoyer. Il faut dire que le lieu est vaste et s’étend sur quelques étages. Cet ancien motel, ayant un temps servi de couvent, accueille maintenant des groupes pour des séjours plus ou moins longs. En ce samedi du mois de juillet, ces couples et ces familles qui s’activent ainsi viennent de terminer la session Cana.

Cana? Oui, Cana, comme dans la noce durant laquelle Jésus a réalisé son premier miracle. Cette session a été créée en 1985 par la Communauté du Chemin neuf, elle-même fondée en France en 1973.

C’est en 1993 que la session Cana a été vécue pour la première fois au Québec. Depuis, des familles et des couples chrétiens – aussi bien que non chrétiens – de partout au Québec s’inscrivent à cette retraite.


Ce texte est tiré du numéro d’hiver 2018 de la revue Le Verbe. La version numérique de ce numéro est disponible gratuitement ici.


Mais qui donc sont ces couples qui renoncent à quelques jours de repos bien mérité pour se plonger ainsi dans une retraite dont ils ne savent à peu près rien? «Certains couples sont en difficulté. D’autres veulent que leur union soit plus enracinée dans le Seigneur», me répond Normand. Avec sa femme Lisette, il est responsable de la session Cana au Canada.

À Cana, nous invitons les couples à vivre une relation à trois! Cette relation à trois est possible en mettant le Seigneur au centre du couple.

Lisette

«Ce n’est pas nécessaire de vivre une situation de couple difficile pour venir à la retraite. Je reçois des demandes d’information sur Cana et l’on me pose souvent cette question. Oui, il y a des couples séparés qui participent. D’autres ne sont même pas mariés. Nous ne demandons pas le certificat de mariage. Cependant, il n’y a pas qu’eux. Je dis souvent que, si nous ne recevions que des couples en difficulté, cela serait très difficile pour nous, mais que, si nous ne recevions que des couples heureux, cela ne produirait pas une bonne session!» me lance-t-il.

Et que vivent ces couples et ces familles? Au moyen d’enseignements et d’échanges entre couples, les participants sont amenés à découvrir ou à redécouvrir le sacrement du mariage. «Nous voulons leur donner le gout de se retrouver. Ils font aussi la découverte de la vie fraternelle», dit Normand. «À Cana, nous invitons les couples à vivre une relation à trois! Cette relation à trois est possible en mettant le Seigneur au centre du couple», m’explique Lisette.

Normand et Lisette ont vécu Cana il y a quelques années. Est-ce que la session a porté des fruits pour eux?

«Cela a apporté une nouvelle dimension à notre couple! Avant Cana, nous vivions notre spiritualité de manière parallèle», me confie Lisette. «Moi, souligne Normand, c’est la vie fraternelle avec les autres couples qui m’a transformé. Après la session, on nous invite à venir faire du bénévolat pour aider les couples qui expérimentent Cana. Cette semaine-là a vraiment changé ma vie!»

Écoutez la chronique d’Yves Casgrain à On n’est pas du monde.

Les organisateurs de la session Cana proposent aux couples de poursuivre le cheminement par un parcours de trois ans. «Cette année, nous comptons quatre fraternités composées de quatre ou cinq couples chacune», m’explique Lisette. Chaque couple reçoit à tour de rôle les autres membres de la fraternité. Des miniretraites d’une fin de semaine sont également offertes à Val-de-Paix.

Pour ceux et celles qui seraient hésitants à s’engager dans un parcours de trois ans, il y a Cana Welcome. «C’est une version allégée de Cana. Elle peut être vécue en paroisse. C’est une démarche qui dure deux ans. La première année, les couples échangent sur des thèmes comme la communication dans le couple. La deuxième année, nous introduisons la spiritualité dans nos échanges», explique Lisette.

Bon, c’est bien tout cela, mais est-ce que des miracles surviennent durant ces sessions? «Des miracles? Cana ne règle pas tous les problèmes. Nous offrons aux participants des outils pour améliorer leur vie de couple», me répond Lisette. «C’est certain qu’une semaine, cela n’est pas suffisant. Chassez le naturel et il revient au galop! Le parcours de trois ans est aussi important», m’explique Normand. «Cependant, nous savons que les couples qui vivent la session sont toujours visités par l’Esprit Saint. Nous le voyons à l’œuvre! C’est certain!» me dit Lisette avec conviction.

Les familles eucharistiques

«[M]on rêve, c’est qu’il y ait des prêtres adorateurs, des paroisses adoratrices, des familles eucharistiques, des communautés adoratrices, des générations d’adorateurs, d’adoratrices.»

Cette phrase a été écrite par mère Julienne du Rosaire en décembre 1991. Mère Julienne du Rosaire (1911-1995) est la fondatrice de la congrégation des Dominicaines Missionnaires Adoratrices, dans l’arrondissement de Beauport.

Des familles adoratrices, vraiment? Eh oui! Vous vous dites surement que ce souhait était, disons, utopique, non? Et pourtant, son rêve s’est réalisé le 6 octobre 1992, dans la ville de Québec, là même où elle a fondé sa communauté en 1945. Depuis cette date, des familles et des couples se réunissent une fois par mois pour partager sur différents thèmes et, surtout, pour vivre une demi-heure d’adoration.

«Notre mission, c’est de devenir des adorateurs du cœur eucharistique!» me lance au bout du fil Mario. Marié et père de trois garçons (15, 19 et 21 ans), il est membre, avec son épouse Chantal, des Familles eucharistiques depuis 17 ans.

«Nos rencontres mensuelles, qui durent environ deux heures, débutent toujours par l’adoration. Ensuite, nous échangeons sur différents thèmes avec les couples présents. Parfois, nous invitons un conférencier.»

Mario et sa femme, ainsi que l’ensemble des couples membres des Familles eucharistiques, transposent à la maison les enseignements reçus dans le groupe et apportent les fruits de l’adoration au sein de leur foyer. «Nous prions à la maison, nous participons à l’eucharistie chaque dimanche. La messe est devenue un moment très important pour nous. Prendre le temps de rencontrer Jésus nous fait du bien.»

L’adoration a produit des fruits inattendus. Chantal souffre d’une maladie mentale. «En 2010, Chantal a été hospitalisée tout l’été. L’année qui a précédé son hospitalisation a été particulièrement difficile. À sa première rencontre après sa sortie de l’hôpital, Chantal était encore souffrante. L’adoration et l’accueil extraordinairement chaleureux des sœurs de la communauté et des couples membres des Familles eucharistiques ont eu un effet des plus bénéfiques!» se souvient Mario.

Savoir qu’une communauté et que des couples prient pour nous, c’est merveilleux! Souvent, les familles croyantes ne sont pas assez soutenues.

Mario

Mario cherche ses mots lorsque vient le temps de parler des bienfaits qu’apportent le mouvement et la congrégation des Dominicaines Missionnaires Adoratrices. Aucun ne lui semble assez juste pour décrire ce que sa femme et lui vivent auprès d’elles.

«Leur soutien est extrêmement important pour nous. Savoir qu’une communauté et que des couples prient pour nous, c’est merveilleux! Souvent, les familles croyantes ne sont pas assez soutenues. Nos familles respectives n’ont pas connu le divorce. Elles sont merveilleuses. Cependant, elles ne peuvent pas vivre la foi telle que nous la vivons! Les Dominicaines et les couples membres des Familles eucharistiques sont devenus notre famille spirituelle!»

Et dire que Mario a hésité avant de s’intégrer aux Familles eucharistiques! «Je vais être bien franc avec vous. Au départ, c’est Chantal qui est allée à leur rencontre. Moi, j’ai suivi plus tard, à reculons. Cependant, après quelques rencontres, j’ai été marqué par ce que je vivais durant l’adoration et dans le partage avec les autres couples. Je ne pouvais plus revenir en arrière!»

Le mouvement Les Familles eucharistiques souligne actuellement ses vingt-cinq ans d’existence. Les membres réfléchissent maintenant à l’avenir du groupe. Puisque les sœurs vieillissent, les participants doivent trouver un moyen de poursuivre cette œuvre sans elles. «Nous avons décidé de nous recentrer sur les enseignements de la fondatrice, sœur Julienne du Rosaire, dont “le point central était l’adoration du cœur eucharistique”», me partage Mario.

À la fin de l’entrevue, Mario tient à adresser une dernière réflexion aux couples qui cherchent un moyen d’enraciner leur vie de couple et de faire grandir leur amour dans le Seigneur. «C’est certain que le couple doit y consacrer un peu de temps et un peu d’énergie, mais cela en vaut tellement la peine!»

* * *

Lorsque le couple a besoin d’un peu d’aide, d’un peu plus d’amour, de soutien, de guides spirituels et de partager son vécu, l’Église répond présente, au plus grand bonheur de ceux et celles qui se laissent toucher par ses différents mouvements.

Ce sont de véritables phares éclairant le chemin parfois chaotique des familles chrétiennes d’aujourd’hui.


Yves Casgrain

Yves est un missionnaire dans l’âme, spécialiste de renom des sectes et de leurs effets. Journaliste depuis plus de vingt-cinq ans, il aime entrer en dialogue avec les athées, les indifférents et ceux qui adhèrent à une foi différente de la sienne.