André
André devant les colis.

Rencontre au front avec André, postier

André est fidèle au poste depuis 30 ans. Il est « chef d’équipe », mais autrefois, on appelait ça « maitre de poste ». 

Derrière son comptoir, c’est habituellement un homme enjoué et engageant qui nous accueille, mais avec la pandémie, pour la première fois de sa vie, c’était la peur qui le dominait.

« Les médias ne parlaient que d’infirmières, de préposés ou autres services de santé, mais moi, postier, j’étais aussi un service essentiel, j’étais aussi en première ligne !

« À part mettre les enveloppes et les colis dans les casiers, le gros de mon travail, c’est le service à la clientèle. Il y a un millier de petits problèmes à régler chaque jour. Là, avec la pandémie, je t’avoue que c’est la folie furieuse ! »

En temps normal, pour l’arrondissement, André reçoit 70 personnes par jour. Depuis le début de la pandémie, « c’est Noël, plus un tiers », comme il dit. « Durant la période des fêtes, ça peut monter jusqu’à 100 personnes. Le mardi de la semaine sainte, c’est monté à 125 ! Juste hier, un lundi ordinaire, j’ai reçu 120 personnes. Tout le monde achète en ligne.

« Avec la prière, la peur est partie. »

André

« Au début, j’étais pas mal sur le mode panique ; j’angoissais terriblement. Je devais souvent interpeler les clients pour qu’ils respectent le deux mètres; il y a toujours des rebelles… 

« Mais il n’était pas question de ne pas rentrer travailler. J’ai un sens du devoir, un sens des responsabilités assez marqué. Alors, chaque jour, dans chacun de mes gestes, j’affrontais un ennemi totalement inconnu et, en plus, invisible. L’angoisse augmentait sans cesse jusqu’au jour où je me suis dit que je devais “prendre su’moi”, comme on dit. »

Retrouver son métier et la prière

« J’ai toujours été croyant. J’ai toujours prié. Mais là, je devais me mettre à prier davantage pour me calmer ! Je dois dire que ç’a été très efficace. Avec la prière, la peur est partie. À un moment donné, faut juste arrêter de se poser mille questions ; on doit rentrer travailler, et faire ce qu’il faut ! »

À la surprise d’André, les choses ont commencé à rouler. « J’ai réalisé que je faisais vraiment partie des services essentiels. Les gens revenaient tous au service postal, c’était un besoin. Ils entraient et me disaient “Merci d’être là !” ou “On est donc contents que tu sois là !” ou “Une chance qu’on t’a !” »

Soudainement, la poste devenait quelque chose d’important aux yeux de la société — même le premier ministre a fait un remerciement spécial aux postiers — comme tous les autres services qu’on est tentés de prendre pour acquis comme les éboueurs, les épiciers, les caissières, les éducatrices, les infirmières… 

À l’arrière, dans le petit centre de tri, André pose de façon anonyme devant la montagne de colis en partance. Pour quelles raisons pries-tu, André ?

« Pour que l’Esprit saint aide les chercheurs à trouver un vaccin. Et pour l’après-pandémie… Ce ne sera pas facile… Pour qu’il y ait un retour à l’essentiel, où le spirituel pourra prendre tout son sens. » 

C’est vrai que, dans la vie, y’a pas que les « services » qui sont essentiels…

Brigitte Bédard

D’abord journaliste indépendante au tournant du siècle, Brigitte met maintenant son amour de l’écriture et des rencontres au service de la mission du Verbe médias. Après J’étais incapable d’aimer. Le Christ m’a libérée (2019, Artège), elle a fait paraitre Je me suis laissé aimer. Et l’Esprit saint m’a emportée (Artège) en 2022.