En ce mois de décembre, divers médias publient leur liste des personnalités marquantes de la dernière année. Que ce soit le palmarès du Times, aux États-Unis, ou de L’actualité, au Québec, ces magazines basent souvent leur choix sur le pouvoir et la célébrité. L’équipe de rédaction du Verbe a décidé de créer sa propre liste des personnes, non pas les plus influentes, mais les plus inspirantes des douze derniers mois. Leurs paroles et leurs actions nous délivrent du cynisme ambiant et nous redonnent le gout de l’engagement. Après un vote serré de nos employés, voici notre top 10.
1. Les chrétiens de Gaza
Pour leur espérance têtue et leur travail d’artisans de paix
Au cœur de la guerre dévastatrice qui oppose Israël et le Hamas, une toute petite minorité d’environ 800 chrétiens tente de survivre dans la bande de Gaza. Leur présence est souvent ignorée des responsables politiques dans ce conflit qui oppose juifs et musulmans. Notre équipe de rédaction a spécialement été touchée cette année par le témoignage de foi de ces Gazaouis embrassant la croix du Christ. Que ce soit les fidèles de l’église orthodoxe Saint-Porphyre ou ceux de l’église catholique Sainte-Famille, ils refusent de contribuer à l’escalade de la haine et militent activement pour la paix. Ils sont sans doute inspirés par cette célèbre parole de saint Paul (Romain 12,21) : « Ne te laisse pas vaincre par le mal, mais sois vainqueur du mal par le bien. » En entrevue au Verbe, Joseph Hazboun, de l’Association catholique d’aide à l’Orient (CNEWA), qui leur vient en aide, nous confiait : « Les chrétiens font partie de la communauté palestinienne et ne sont pas épargnés du conflit : ils vivent la situation dramatique à Gaza et subissent les mêmes souffrances. » Comment ne pas être ému par ces témoins du Christ qui, dans l’impuissance et la souffrance, espèrent contre toute espérance ?
2. Sainte Marie-Léonie Paradis
Pour son exemple héroïque de charité dans la vie quotidienne
Même si elle est décédée en 1912, Marie-Léonie Paradis est encore bien vivante et agissante. Après la reconnaissance d’un second miracle attribué à son intercession et qui défie les connaissances actuelles de la science, cette petite fille de Saint-Jean-sur-Richelieu est devenue, le 20 octobre dernier, la troisième femme née au Canada reconnue sainte par l’Église catholique. Elle est désormais présentée au monde entier comme un modèle d’humilité et de charité. Toute la vie de la fondatrice des Petites Sœurs de la Sainte-Famille à Sherbrooke est un exemple d’amour intense dans le service fidèle et discret. « C’est la sainte du quotidien, celle des travailleurs de l’ombre qui sont souvent ignorés », confiait au Verbe sœur Lemieux, plus tôt cette année. Elle nous a laissé ce conseil pour réussir sa vie : « Soyez humbles, sans aucune prétention, aimant à vous oublier et à faire plaisir aux autres, et vous serez toujours heureuses ».
3. Le Cardinal Pierbattista Pizzaballa
Pour son leadeurship en faveur de la paix au Proche-Orient
Le patriarche latin de Jérusalem est devenu célèbre en octobre 2023 lorsqu’il s’est porté volontaire comme otage si cela pouvait contribuer à la libération d’enfants détenus par le Hamas. En 2024, l’évêque franciscain n’a cessé d’œuvrer pour la paix au Proche-Orient. En plus de participer aux négociations internationales pour un cessez-le-feu à Doha, en aout dernier, il a été au mois de mai le premier chef religieux à entrer à Gaza pour une visite pastorale et humanitaire aux deux petites communautés catholiques et orthodoxes. Lors d’une entrevue aux médias du Vatican, il a déclaré : « La paix est une culture, ce n’est pas quelque chose que l’on doit faire, c’est la politique, c’est l’éducation, c’est l’engagement des médias, c’est travailler à 360 degrés dans un monde globalisé où personne n’est une ile ».
4. Les bénévoles et bienfaiteurs anonymes
Pour leurs actes de charité qui transforment notre monde sans faire de bruit
Selon Statistique Canada, il y aurait 24 millions de Canadiens impliqués dans une forme de bénévolat au pays, soit 79 % de la population âgée de 15 ans et plus. Ces bénévoles donnent en moyenne 5 milliards d’heures par an à divers organismes communautaires, des églises, des hôpitaux, des associations sportives ou culturelles. Si l’on voulait les remplacer, il nous faudrait embaucher 2,5 millions de personnes à temps plein ! C’est votre grand-mère, votre frère, votre voisine ou votre collègue de travail. Ils sont partout et changent le monde en agissant localement. Aussi, 5 millions d’âmes généreuses déclarent donner plus de 11 milliards de dollars chaque année au pays en don de charité. Notre équipe de rédaction voit en tous ces bienfaiteurs une raison de ne pas perdre espoir en l’humanité. Pour chaque mauvaise nouvelle qui fait les manchettes, des milliers d’actes de charité sont posés dans l’ombre.
5. Le pape François
Pour son engagement acharné en faveur de la justice et de la paix
En sa 88e année de vie, et la 12e de son pontificat, le pape François ne se lasse pas de lutter pour la justice et la paix partout où il prend la parole. En plus d’avoir présidé la dernière session du Synode sur la synodalité, le Saint-Père a effectué trois voyages apostoliques internationaux, visitant sept périphéries de l’Église catholique : la Papouasie-Nouvelle-Guinée, l’Indonésie, le Timor oriental, Singapour, la Belgique, le Luxembourg et la Corse, où il se rendra le 15 décembre prochain. Dans sa quatrième lettre encyclique, publiée le 24 octobre dernier, il nous a laissé une sorte de testament spirituel, où il propose de revenir à l’essentiel du message chrétien pour renouveler le monde : l’amour humain et divin du Cœur de Jésus-Christ. « Le Cœur du Christ est extase, écrit-il, il est sortie, il est don, il est rencontre. En lui, nous devenons capables de relations saines et heureuses les uns avec les autres et de construire le Royaume de l’amour et de la justice dans ce monde. Notre cœur, uni à celui du Christ, est capable de ce miracle social. » Avec ce pape, nous revient chaque jour ce verset du psaume 84 : « Amour et vérité se rencontrent, justice et paix s’embrassent ».
6. Roseline Hamel et Nacera Kermiche
Pour leur amitié miraculeuse, puissant témoignage de réconciliation
Le 26 juillet 2016, en France, le père Jacques Hamel est assassiné en pleine messe. Cet attentat terroriste secoue l’Hexagone et les catholiques du monde entier. Après cette tragédie, deux femmes qui aurait pu devenir ennemies ont fait le choix de se lier d’amitié. Roseline Hamel, la petite sœur du père Jacques, et Nacera Kermiche, la mère de l’assassin, ont dépassé les frontières du ressentiment et des préjugés et se sont rencontrées à plusieurs reprises dans une perspective de guérison commune. Lors d’une rencontre avec notre journaliste Sarah-Christine Bourihane, Roseline Hamel nous confiait : « Il m’est venu l’idée de me mettre à la place de la maman de cet enfant qui s’était trompé de chemin. Si ça avait été moi, quelle aurait été ma douleur ? Je me suis dit que je devais aller la rencontrer, car sa douleur devait être plus grande que la mienne. » En 2024, les deux femmes ont accepté de témoigner dans plusieurs médias. Leur amitié quasi miraculeuse nous convainc que la puissance du pardon dépasse celle de la haine.
7. Le Cardinal Jean-Marc Aveline
Pour sa contribution au dialogue interreligieux dans le pourtour méditerranéen
L’archevêque de Marseille est sans conteste une figure de proue dans le dialogue interreligieux et la solidarité envers les migrants. Dans une entrevue récente au Verbe, le cardinal, né en Algérie, nous a démontré que des relations d’amitié entre chrétiens et musulmans sont toujours possibles. En 2024, il a été l’envoyé spécial du pape François pour le 350e anniversaire de fondation de l’archidiocèse de Québec. Ses prises de parole dans la première église d’Amérique du Nord ont marqué les esprits, appelant à une véritable conversion : « Église de Québec, n’oublie pas que ta mission n’est pas de devenir un musée afin de conserver un patrimoine ! […] Prends ta part de la lutte contre l’injustice. Sois proche de ceux qui souffrent d’être abandonnés, incompris, rejetés, méprisés. […] Ne reste surtout pas rivée sur tes problèmes internes d’organisation. Décentre-toi ! Mets au centre le Christ et les pauvres, ainsi, tu es sure de ne pas te tromper ! »
8. Jonathan Pageau
Pour son approche symbolique qui attire des milliers de jeunes en quête de sens
Ce Youtubeur montréalais est en train d’opérer une petite révolution de notre rapport existentiel à la Bible. Depuis quelques années, l’artiste de tradition orthodoxe a popularisé une lecture symbolique des Saintes Écritures en dialogue avec le monde contemporain. Durant une rencontre avec notre journaliste James Langlois, il nous a confié : « J’ai toujours aimé la Bible et les histoires bibliques. Une chose que j’ai découverte, c’est que ces histoires ne nous racontent pas seulement des moments importants ou ce qui est arrivé dans le passé, mais elles ont aussi un côté structurel, c’est-à-dire qu’elles sont comme une sorte de carte de la réalité avec laquelle on peut saisir la façon dont le monde se déploie. » En 2024, Jonathan a enregistré des dizaines de vidéos qui ont rejoint des millions de jeunes adultes en quête de sens. Nous avons particulièrement aimé sa conversation avec Mgr Robert Barron sur son parcours de foi, les schèmes dans la Bible et l’importance des Pères de l’Église.
9. Timothy Paul Schmalz
Pour ses sculptures bibliques créatives et engageantes
L’artiste canadien Timothy Paul Schmalz réussit l’exploit de rejoindre aussi bien les croyants que les passants partout où sont exposées ses œuvres d’inspiration biblique. Chacune de ses sculptures, qu’il qualifie de « prière visuelle », ne se contente pas d’illustrer un personnage, mais interpelle celui qui la contemple. Depuis 2019 sur la Place Saint-Pierre, au Vatican (et depuis 2022, à l’Oratoire Saint-Joseph de Montréal), se trouve sa grande statue de bronze intitulée Angels Unawares représentant un bateau de migrants au centre duquel se cache un ange. Cette pièce actualise la parole de la lettre aux Hébreux (13:2) : « N’oubliez pas l’hospitalité : elle a permis à certains, sans le savoir, de recevoir chez eux des anges ». En 2024, Timothy a inauguré plusieurs œuvres un peu partout dans le monde, dont deux dans la région de la capitale nationale. La basilique Sainte-Anne-de-Beaupré a acquis sa sculpture intitulée When I was Hungry and Thirsty représentant un Christ mendiant qui nous tend la main à l’entrée de l’église. La cathédrale Holy Trinity dans le Vieux-Québec a, quant à elle, dévoilée Be Welcoming, une œuvre qui représente un pauvre pèlerin ou un ange, selon que l’on ose ou pas s’assoir à ses côtés. Qui sait, peut-être que la beauté sauvera vraiment le monde !
10. La cathédrale Notre-Dame de Paris
Pour le symbole fort d’espérance et de transcendance que représente sa réouverture
Cinq ans après son incendie qui a ému le monde entier, la cathédrale Notre-Dame de Paris a rouvert ses portes le 8 décembre dernier. Grâce à la générosité de 340 000 donateurs provenant de 150 pays, totalisant 846 millions d’euros, et au talent de plus de 2000 artisans et de 250 entreprises, ce chef-d’œuvre de l’architecture gothiquea pu retrouver toute sa splendeur originelle, avec quelques ajouts d’art contemporain. La réouverture historique de cette cathédrale est un signe d’espérance très puissant en ces temps de troubles sociaux, économiques et politiques en Europe. Ce n’est pas seulement l’église de pierre, mais toute la civilisation chrétienne qui est appelée à se reconstruire, non pas dans une posture triomphaliste, mais en s’enracinant dans ses valeurs universelles de justice et de charité. Un symbole de beauté, d’ouverture et de transcendance dont notre monde a plus que jamais besoin.
Encore plus d’inspiration…
Plusieurs autres personnalités ont inspiré l’équipe du Verbe en 2024. Sans s’être hissées en tête du palmarès, elles nous ont touchés d’une manière spéciale. Les voici, en rafale :
- Stéphane Bureau, pour ses entrevues intelligentes et sans complaisance qui nous sortent des discours convenus ;
- Jérémy-Noah Thériault, pour sa conversion chrétienne et son audace à parler de sa foi sur les réseaux sociaux ;
- Paul St-Pierre Plamondon, pour son style constructif à l’Assemblée nationale ;
- Simone Biles, pour ses quatre médailles olympiques en gymnastique, qu’elle attribue à Dieu ;
- Jordan Peterson, pour son livre We Who Wrestle with God, qui rejoint des millions de jeunes en questionnement existentiel ;
- Josée-Anne Sarazin-Côté, pour son courage face à la maladie et son ouverture à en parler sur YouTube ;
- Céline Dion, pour son Hymne à l’amour, au sommet de la tour Eiffel : « Dieu réunit ceux qui s’aiment ! »
Ce palmarès est sans doute incomplet, mais il vise surtout à rappeler que ce qui change le plus notre monde n’est pas tant le pouvoir, l’argent et la renommée, que la foi, l’espérance et la charité.