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Édith Stein : sainte, juive, catholique et philosophe

« Une vie dans l’abondance et le confort bourgeois est en contradiction 
avec l’esprit d’une sainte pauvreté et sépare du Pauvre crucifié »

Édith Stein, La crèche et la croix

Il y a 78 ans aujourd’hui, la carmélite Thérèse-Bénédicte de la Croix, sa sœur Rosa et presque mille autres déportés juifs mourraient gazés au camp d’extermination d’Auschwitz-Birkenau.

Quelques jours auparavant, lorsque les deux sœurs Stein se font arrêter au Carmel d’Echt, aux Pays-Bas, Édith aurait adressé cette ultime exhortation à l’endroit de Rosa : « Viens, allons, pour notre peuple. » 

Ces paroles révèlent la grandeur d’âme et l’attachement profond que la sainte juive portait à sa race et à ses racines. La double appartenance d’une « catholique juive » a fait couler beaucoup d’encre et lever autant de boucliers lors de sa béatification

Jean Paul II a su répondre humblement à ses détracteurs en présentant la vie de la bienheureuse comme ayant été littéralement transfigurée par la grâce, et ce comme femme et philosophe, mais bien sûr aussi comme fille d’Israël et enfin comme religieuse catholique. Et afin d’unir les esprits, il a déclaré vouloir établir ce jour comme une commémoration de la Shoah par toute l’Église catholique. 

Lampe sur la route

C’est avec beaucoup de reconnaissance que je me rappelle l’aide salutaire qu’elle m’a apporté durant mes années au séminaire Redemptoris Mater du Liban. Elle a été une lampe sur ma route mise par le Seigneur pour m’aider à passer à travers les ténèbres existentielles dans lesquelles je me trouvais. 

À son école, par l’exemple de sa vie, elle m’a montré l’importance de l’héritage reçu par l’éducation et par le sang, mais aussi du don total. Telle est la sagesse de la croix.

[Édith Stein] a été une lampe sur ma route mise par le Seigneur pour m’aider à passer à travers les ténèbres existentielles dans lesquelles je me trouvais. 

Aujourd’hui, je souffre avec ce peuple qui m’a adopté et qui est si durement éprouvé. Étant Canadien, ma présence au Liban étonnait souvent les gens qui, pour leur part, rêvaient tous de s’installer ici. Mais comme dit l’extrait en exergue, Dieu qui est le Pauvre se manifeste d’une façon spéciale aux déshérités et Il nous invite à le suivre, nous, petits-bourgeois, sur le chemin du Calvaire. 

Tel est le chemin qui mène à la Vie, et notre sainte disait que « le Christ pauvre anéanti, crucifié et même abandonné par son Père céleste a été dépouillé de tout, de tout résidu d’égo, humilié dans son être le plus intime ». 

Le scandale et la vérité

Ce qui jadis était scandale pour les Juifs et folie pour les Grecs ne l’est pas moins aujourd’hui en 2020, où l’on croyait avoir dompté la nature et construit un monde confortable. Cependant nous sommes bien obligés de constater que l’homme reste un être frêle et la vie sur cette terre un souffle qui passe, et qu’il semblerait que le sens de l’histoire transcende nos visées utilitaristes et matérialistes. 

Aujourd’hui comme durant les horreurs du siècle dernier, Dieu invite les hommes à la solidarité et à l’union avec Lui par les souffrances de son Fils crucifié.

C’est justement ce que sainte Édith Stein a fait.

En terminant ce texte, je ne trouve pas cela insignifiant et futile de demander l’intercession d’une sainte juive pour le pays de Tyr et de Sidon. Et même si tous ces évènements de mort et désolation nous dépassent complètement, je suis certain que le Seigneur n’a pas oublié les enfants des Cèdres comme il guide encore jusqu’à ce jour son premier-né Israël.

Sainte Thérèse-Bénédicte de la croix, priez pour nous !

Emmanuel Bélanger

Après avoir commencé son cursus théologique et philosophique au Liban, Emmanuel Bélanger a complété son baccalauréat en philosophie à l'université pontificale Angelicum. Sa formation se ponctue de diverses expériences missionnaires au Caire, à Alexandrie, au Costa-Rica et à Chypre.