Carlo Acutis
Illustration: Marie-Hélène Bochud

Carlo Acutis, l’apôtre des geeks

Le 12 octobre 2006, Carlo Acutis, un jeune Italien de quinze ans, meurt à l’hôpital des suites d’un cancer fulgurant quelques jours après son admission. À ses funérailles, une foule hétéroclite s’est déplacée pour lui rendre un dernier hommage. Les bancs se sont remplis les uns après les autres. Peu à peu, au grand étonnement de ses parents, des personnes se sont massées sur le parvis, puis sur la place devant l’église. Tous venaient lui dire au revoir. Seize ans plus tard, Carlo Acutis est sur le point de devenir le saint patron de l’Internet.  Pour en savoir davantage sur ce jeune béatifié le 10 octobre 2020, Le Verbe s’est entretenu avec un de ses biographes.

« Il aimait les Pokémon. Il aimait les films policiers. Il aimait les jeux-questionnaires à la télévision. Il aimait bien personnifier James Bond. C’était un gosse pour vrai! », me lance Jean-Luc Moens, auteur du livre Carlo Acutis. La passion du ciel, paru en 2019 aux éditions Le Livre Ouvert.

Carlo Acutis est né en 1991 au Royaume-Uni. Ses parents, italiens, ne sont pas pratiquants. Ils suivent tout de même la tradition familiale et le font baptiser dans une paroisse de Londres. C’est le premier enfant de ce couple fortuné. Quelques mois après le baptême, le couple retourne en Italie.  

Durant les premières années de sa vie, sa nounou polonaise lui parle sans cesse de Jésus et l’initie à la prière. Ses parents ne s’en offusquent pas. À quatre ans, Carlo confie à son père et à sa mère avoir vu en songe son grand-père, mort quelque temps auparavant. Il lui demandait de prier pour lui afin qu’il puisse quitter le purgatoire.

« Imaginez la tête de ses parents! Lorsque j’ai questionné sa mère à ce sujet, j’ai été bluffé par sa réponse. Elle a consulté un curé qui lui a conseillé d’entreprendre des études en théologie! Je trouve que le curé avait un sacré culot! C’est donc ce qu’elle a fait! », relate Jean-Luc Moens.

L’eucharistie quotidienne

Depuis cet évènement, le jeune Carlo prie pour le salut de sa famille, de ses serviteurs et de ses amis. « Carlo est devenu très sensible au salut des pécheurs, au salut de l’humanité. Il ne voulait pas aller au ciel tout seul! »

La prière le guide très rapidement vers l’eucharistie. « Il allait à la messe de 18 heures. Il restait pour adorer devant le tabernacle. Sa mère m’a confié qu’elle le conduisait le plus souvent possible. Parfois, sa grand-mère s’en chargeait. Carlo y allait parfois avec son serviteur hindou, Rajesh, qui restait avec lui tout au long de l’eucharistie. Rajesh s’est converti du vivant de Carlo. »

Sa passion pour l’eucharistie ne s’est jamais démentie, même à l’adolescence. « Il ne comprenait pas que les gens soient si peu passionnés par l’eucharistie. Il disait : « Comment est-il possible que des milliers et des milliers de personnes aillent dans un stade pour assister à un match de soccer alors que Dieu se donne dans l’église d’à-côté sans que personne ne vienne? » »

Carlo avait l’habitude d’écrire ses pensées. Un jour, il écrit : « L’eucharistie est mon autoroute pour le ciel. »

« Cette phrase est exceptionnelle. [Dans l’esprit de Carlo], l’eucharistie n’est pas une autoroute que pour lui. Elle est aussi notre autoroute pour le ciel », précise le biographe.

Sa foi et son comportement ont produit des miracles dans sa propre famille. « Toute sa famille a fini par se convertir, petit à petit », souligne Jean-Luc Moens.

Si Carlo découvre la puissance de la messe très tôt dans sa vie, la charité entre aussi rapidement dans son quotidien. « Lors des funérailles, la place était pleine devant l’église. C’était tous les pauvres qu’il avait visités et qui étaient venus lui rendre un dernier hommage. »

Comme son modèle, saint François d’Assise, Carlo avait l’habitude de s’arrêter sur le chemin lorsqu’il rencontrait un pauvre. « Sa maman m’a confié que son fils a été touché par l’humilité de saint François. Il a voulu l’imiter », révèle Jean-Luc Moens.

Un adolescent normal

Pourtant, Carlo ne se distinguait pas des autres adolescents de son âge. « C’était un ado normal. C’est rassurant et édifiant. Rassurant, car cela veut dire que nous pouvons demeurer nous-mêmes et devenir saints. Nous ne sommes pas obligés d’être confits en dévotion. Cette confiture-là ne passe plus aujourd’hui et elle est peut-être un peu factice aussi. »

Un adolescent normal, mais qui possédait une intelligence hors du commun. « Aujourd’hui, on dit qu’il était un HP, c’est-à-dire [un enfant] à haut potentiel [intellectuel]. C’était un jeune très intelligent. Il se passionnait pour l’informatique. Il était tellement doué que l’on n’arrivait pas à croire qu’il avait bien 14 ou 15 ans. Il travaillait avec des universitaires qui s’étonnaient qu’un jeune puisse en savoir autant. Le Vatican pense à lui pour être le saint patron de l’Internet. »

Carlo naviguait tout le temps sur le Web. Un jour, il a l’idée de concevoir une exposition sur les miracles eucharistiques grâce à ses recherches virtuelles. Sa mort survient toutefois avant que son œuvre ne soit inaugurée.

Cette exposition est une des facettes de son œuvre évangélisatrice. « Il aimait bien évangéliser ses amis. Il était radical sur la question de la pureté. Il manifestait sa désapprobation lorsque ses camarades se livraient à des blagues scabreuses ou visitaient des sites douteux. »

Tout comme la réputation de cette exposition ne cesse de croitre, la réputation de Carlo augmente de jour en jour. « Dans la francophonie, le nombre de livres sur Carlo explose. Ce que l’on appelle en latin la fama sanctitatis, la réputation de sainteté, grandit dans le monde entier à travers Internet, les livres et l’exposition itinérante. »

Sa récente béatification a accéléré les choses. « C’est clair que de plus en plus de personnes le découvrent et cela n’est pas fini. Le Québec a tout intérêt à découvrir ce jeune! C’est un nouveau Dominico Savio pour notre temps! Je fais une prophétie : le Canada va beaucoup l’aimer! », lance Jean-Luc Moens.

Yves Casgrain

Yves est un missionnaire dans l’âme, spécialiste de renom des sectes et de leurs effets. Journaliste depuis plus de vingt-cinq ans, il aime entrer en dialogue avec les athées, les indifférents et ceux qui adhèrent à une foi différente de la sienne.