Démêlés avec la justice, drogue, alcool, trafic de drogue, multiples tentatives de suicide… Sylvain Bédard a été plongé dans les ténèbres pendant plusieurs années avant de se tourner vers Dieu, lent à la colère, compatissant et miséricordieux. Récit d’un homme qui l’a échappé belle.
Cadet d’une famille de six enfants, Sylvain Bédard n’a pas eu une vie facile. Originaire du quartier Neufchâtel à Québec, Sylvain a accueilli dans sa famille — qu’il qualifie de « dysfonctionnelle » — deux sœurs adoptées. « Dans les années 1970, les critères des services sociaux n’étaient pas vraiment stricts. Il n’y avait pas d’étude de dossier », se souvient-il.
Au début des années 1980, une crise familiale provoque le divorce des parents de Sylvain. « J’ai pas mal été laissé à moi-même. Mes frères et sœurs étaient déjà mariés, mon père s’était fait une maitresse et ma mère avait un chum. Je ne recevais pas assez d’encadrement ; je manquais d’amour et d’attention. J’ai rapidement délaissé l’école, et je suis tombé dans la consommation de drogue et d’alcool à l’âge de 12 ans », raconte-t-il.
La spirale des complications s’est enclenchée, au point où, un an plus tard, en pleine fleur de l’adolescence, Sylvain se met à vendre de la drogue en cherchant un peu d’attention. Il la trouve auprès d’une gang de « chums » dépendants de l’alcool et de la drogue.
Sylvain avoue qu’il avait trop de blessures à l’époque pour être bien dans sa peau. Il voulait tout simplement engourdir la douleur. À ce moment, Dieu n’est qu’une référence culturelle pour lui.
« J’étais dépendant affectif. Je me tenais avec le monde de la consommation, de la prostitution, des danseuses, des femmes souffrantes… J’ai connu la mère de ma fille dans la consommation. J’ai commis ma première tentative de suicide quand elle a voulu me laisser », confie-t-il.
Sylvain avoue qu’il avait trop de blessures à l’époque pour être bien dans sa peau. Il voulait tout simplement engourdir la douleur. À ce moment, Dieu n’est qu’une référence culturelle pour lui. « Je croyais en son existence, mais je n’avais pas une foi sincère ; mon égo m’empêchait de m’approcher de lui », explique-t-il.
Un refuge au milieu de la souffrance
Coincé dans l’œil du cyclone, retenu captif par la consommation de drogues dures, Sylvain était constamment déprimé ; il passait ses journées à consommer. « C’était carrément une vie de souffrance. J’en étais venu à croire que l’enfer était sur terre et que Dieu m’avait abandonné. Mais ce n’était pas le cas ! C’était moi qui m’étais détourné de lui. Il m’a tout le temps protégé, tout au long de ma vie, mais je ne voulais pas le voir », témoigne-t-il.
Malgré tout, Sylvain entretenait une assez bonne relation avec ses parents. À leur mort en 2011, il a reçu un héritage, toutefois vite dilapidé pour acheter de la drogue. « J’ai fait sept overdoses, où j’ai failli mourir parce que je m’injectais. […] Je suis allé en psychiatrie à l’hôpital deux fois, via le programme d’aide aux employés de l’entreprise pour laquelle je travaille, car mon syndicat avait peur que je me suicide. Après ça, j’ai perdu tout ce que j’avais. Je suis devenu itinérant, seul et sans ma fille », déplore-t-il.
Ainsi, pendant un mois, vêtu d’un veston de cuir et de vieilles espadrilles, Sylvain s’est mis à errer sans domicile fixe dans les rues de Montréal, à la recherche d’un peu de chaleur dans les bouches de métro et d’un baume pour son cœur.
L’ex-toxicomane a continué à se détruire en consommant.
Pire encore, les pensées noires continuaient à l’habiter et à l’oppresser, au point qu’il a commis une autre tentative de suicide. Cette fois, sa pression artérielle avait dramatiquement baissé, car il s’était coupé les veines et il avait perdu beaucoup de sang. « Quand la police m’a trouvé, j’avais perdu deux litres de sang. J’étais à terre, en train de faire des convulsions. […] Après avoir miraculeusement survécu, j’ai réalisé que je devais me prendre en main si je ne voulais pas y passer. Ç’a été ma dernière tentative de suicide », souligne-t-il, d’un ton posé.
Le 22 janvier 2016, Sylvain Bédard est entré dans une salle de CA (Cocaïnomanes anonymes). « J’ai pleuré ma vie pendant trois heures. J’ai alors décidé d’ouvrir mon cœur à Dieu. Ma vie a complètement changé. Je ne me suis plus jamais senti seul. J’ai retrouvé ma vie, mon travail, un logis et tous les biens pour être fonctionnel dans la société. Maintenant, j’ai des amis qui sont positifs et ne consomment pas », affirme-t-il fièrement.
Une communauté d’entraide
Le mode de vie de Sylvain Bédard se base sur les étapes des Alcooliques anonymes (et par le fait même sur celles des CA). « Ça fonctionne, mais ça prend de l’honnêteté. Dieu passe au travers des évènements et des personnes pour nous faire grandir. Je participe aux rencontres basées sur Dieu. Je ne vais pas à l’église, mais je suis croyant. Plus je suis dans une position d’humilité, plus je me rapproche de Dieu », affirme-t-il.
Chaque matin, il prie Dieu pour lui demander de le libérer de toute emprise, de toute dépendance, en plus de lui donner la paix et la sérénité. Il n’oublie pas non plus de lui confier sa santé et sa forme physique.
Selon lui, Dieu a permis qu’il survive à bien des épreuves notamment pour aider son prochain. « Ça peut être aussi simple que d’ouvrir la porte à une personne âgée ou écouter attentivement un itinérant. Une foi sans les œuvres est morte. C’est important de confier notre vie à Dieu ; il est toujours près de nous et répond à nos besoins. »
Aujourd’hui, Sylvain Bédard compte plus de 1450 jours d’abstinence de toute substance qui altère le comportement, sauf un médicament prescrit par le médecin. « Je suis tellement fier ! Je suis aussi devenu grand-père. Ma fille Carolan m’a donné une petite-fille, Lilia. C’est comme un cadeau de rétablissement, une raison de continuer mon cheminement », conclut-il.