Vous avez écouté la grand-messe dominicale de Tout le monde en parle (remarquez que je ne publie pas l’hyperlien de l’émission…), faisant l’éloge des chirurgies de changement de sexe pour enfants et de la soft-porn financée par l’État?
Moi non plus.
J’étais trop occupé à plier du linge en regardant les premiers épisodes de Like-moi. En fait, pour être franc, je n’ai réussi qu’à plier deux serviettes pendant que mon épouse-ex-employée-du-mois-chez-Simons pliait trois paniers bien tassés de caches-couches et de chaussettes dépareillées.
Like-moi, antidote à TLMEP?
Mais revenons-en à Like-moi.
Outre l’excellent thème musical rétro « Ça fait boom boom pow » (signé Jean St-Jacques) et son visuel d’intro psychédélique, cette série diffusée par Télé-Québec a plusieurs qualités.
Bien sûr, ce n’est pas parfait. Les clips sont plutôt inégaux et on sert de nombreuses répétitions pour faire les gags.
Ceci dit, très souvent, ça vise pas mal dans le mille.
Soyez avertis: ce n’est pas très flatteur pour notre génération. On y présente souvent les 25-35 ans comme une bande d’attardés, incapables de devenir adultes, d’un certain décentrement de leur nombril, d’une reconnaissance de l’altérité.
Nos relations – qu’elles soient amoureuses, amicales ou virtuelles – sont souvent superficielles, contaminées par une logique de consommation et empreintes d’expressivité sans intériorité.
Mais au moins, l’émission met le doigt sur le bobo. Nos relations – qu’elles soient amoureuses, amicales ou virtuelles – sont souvent superficielles, contaminées par une logique de consommation et empreintes d’expressivité sans intériorité.
Bref, ce n’est pas que comique. Like-moi invite aussi sérieusement à la réflexion sur nos rapports interpersonnels. À l’aide d’un humour qui, j’en conviens, ne plaira pas à tout le monde, cette émission a au moins le mérite de poser un regard critique sur certains aspects pas trop glorieux de notre époque.
Relativisme moral
À l’inverse, la machine publicitaire et le battage médiatique financé par les contribuables vantant les qualités de Sexplora, simulacre de documentaire animé par Lili Boisvert, a quelque chose d’un peu faux-cul.
En fait, l’émission est beaucoup moins subversive qu’elle le prétend.
Comme si le diffuseur sentait le besoin d’exposer des foufounes à l’écran télé de ma grand-mère qui n’a pas encore été atteinte par le X via Internet.
Évoquant plusieurs fois les normes pornographiques, la série Sexplora apparait comme une version soft de ce que tout le monde peut voir gratuitement et en tout temps partout sur le web. Comme si le diffuseur sentait le besoin d’exposer des foufounes à l’écran télé de ma grand-mère qui n’a pas encore été atteinte par le X via Internet.
Vers la fin de l’entrevue, Guy A. Lepage, dans un questionnement moral sincère, demande à Lili : « C’est une bonne ou une mauvaise chose d’être asexuel? ». La réponse, sans grande surprise, n’a rien de très philosophique: on réfère pathétiquement aux récents diagnostics de la psychiatrie.
Difficile d’être plus conformiste dans la manière d’aborder ces questions.
Nouvelle subversion
Je persiste à croire que la nouvelle subversion n’est pas de dire candidement à la télé publique qu’on est capable d’atteindre l’orgasme en 1 min 8 s grâce à une bébelle à batteries.
Après avoir entendu parler de fétichisme bienveillant aux heures de grande écoute, je crois plutôt que la réelle subversion, aujourd’hui, ce sont ces mots du philosophe Hadjadj lorsqu’il parle de la dangereuse morale sexuelle telle que promue par l’Église catholique :
Ce que tu fais, fais-le bien. Ce qui veut dire ici : « Si tu choisis l’acte sexuel, va jusqu’au bout, sans réticence, sans obstacle, dans une étreinte qui ne s’arrête pas à une friction des muqueuses, mais qui te pousse à rejoindre l’autre jusque dans sa personne et à libérer votre commune fécondité. »
– Fabrice Hadjadj