Rompre avec la culture du déchet

Chaque jour, je vois mon bébé manger quelques bouchées de ce que je lui sers, puis jeter le reste au sol.

Quel gaspillage !, me dis-je.

Ça doit être ça que Dieu se dit en nous voyant exploiter toutes les ressources de la Terre pour finalement jeter au sol la majorité des choses qu’on possède.

Le concept de « culture du déchet » développé par le pape François dans Laudato Si’ résonne fort en moi.

Quand je regarde autour de moi, quand je me regarde, j’avoue que la durabilité n’est pas un réflexe que nous avons collectivement.

Dans un évènement, on va utiliser des ustensiles en plastique « parce que c’est plus simple ».

C’est plus simple de fabriquer des ustensiles jetables en Chine, de les transporter jusqu’au Québec, de les vendre dans un magasin, de les acheter, de les utiliser, de les jeter, de les collecter avec un camion-poubelle, puis de les enfouir ou de les incinérer.

C’est vraiment plus simple ? Plus simple pour qui ?

Plus simple pour nous.

Penser comme ça, c’est un peu considérer l’autre comme un déchet aussi.

Notre temps à nous est trop précieux pour laver des ustensiles, mais le temps des travailleurs exploités pour fabriquer des ustensiles en plastique, ça, nous nous en foutons.

Loin des yeux

Je pense que nous avons autant de facilité à jeter parce que nos déchets disparaissent.

Une fois par semaine, ils sont mis au bord du chemin et pouf ! Disparus.

En anglais, on dit throw away. Sauf que away n’existe pas. Away, c’est toujours chez quelqu’un d’autre. C’est juste pas chez nous.

Je me dis que si chacun devait enterrer ses déchets dans sa cour arrière, on ferait autrement plus attention au suremballage, à la surconsommation.

On y penserait à deux fois avant de s’acheter du nouveau linge et on essaierait beaucoup plus de réparer et réutiliser ce qu’on a sous la maison.

Mais comme nos déchets partent au loin, on ne sait pas où, nous ne voyons pas les dommages qu’ils font.

Il parait qu’il y a une ile de déchets de plastiques dans l’océan. Moi, je ne l’ai jamais vue.

En plus, je mets mes déchets dans ma poubelle, alors ça ne peut pas être de ma faute…

En anglais, on dit throw away. Sauf que away n’existe pas. Away, c’est toujours chez quelqu’un d’autre. C’est juste pas chez nous.

Tout est déchet

Ce qui me décourage vraiment dans tout ça, c’est que le jetable gagne du terrain. 

Comme si c’était pas suffisant de jeter nos ustensiles en plastique, nous jetons maintenant nos vêtements démodés, et même nos blenders brisés.

Même dans les magasins, beaucoup de retours et d’invendus sont balancés aux poubelles. Sur les chaines de production, les matériaux sont gaspillés.

Combien de fruits sont cultivés pour être jetés avant même d’atteindre les tablettes d’une épicerie ? Combien de gens affamés auraient pu être nourris avec ces surplus ?

On se comporte vraiment comme des enfants gâtés à vouloir du lait d’amande, du tempeh et des avocats à longueur d’année.

Mon bébé aussi, il en a, des caprices alimentaires. Mais je ne tolèrerais jamais qu’il enlève la nourriture de ses frères et sœurs pour – le comble ! – jeter tout ça par terre.

Je me demande donc pourquoi j’accepte de faire ça à mon prochain avec mes habitudes de consommation.

Et quand j’y pense, je me sens vraiment comme un déchet.

Ariane Blais-Lacombe

Ariane est une jeune mère passionnée de périnatalité. Diplômée en sciences politiques, elle aime écrire et réfléchir sur le Québec d’aujourd’hui et son rapport à la vie de famille.