Découverte étonnante à Londres sur quatre fragments des manuscrits de la mer Morte. Grâce à l’imagerie multispectrale, des chercheurs ont révélé des caractères hébraïques invisibles à l’œil nu. Et sur l’un d’eux est même apparu un mot entier : shabbat !
Shabbat. Voilà un mot qui tombe à point. Tout porte à croire que la Providence voulait que les hommes l’entendent résonner de nouveau en notre temps hyperactif.
Shabbat signifie « repos ». Mais qui dit repos dit aussi travail. Car le repos sabbatique libère l’homme de l’esclavage du travail. Après tout, le mot « travail » vient du latin tripalium, soit un instrument de torture auquel on attachait les esclaves pour les punir.
L’homme n’est pas fait pour le travail, mais le travail est fait pour l’homme.
Cet aspect libérateur du sabbat s’exprime à merveille dans les liturgies juives où l’on fait mémoire de la sortie d’Égypte. Chaque samedi, les juifs chantent ainsi que Dieu est leur libérateur.
Le travail est certes nécessaire, excellent même, puisqu’il nous élève à la dignité de cocréateurs en nous invitant à parachever l’œuvre de Dieu. Mais si nous devenons incapables de fixer une limite à notre action sur le monde, alors le travail lui-même nous asservira et nous aliènera. Burnout, boreout, brownout. Notre rapport désordonné au travail n’est-il pas la plus grande maladie du nouveau millénaire ?
Retrouver le sens du sabbat, du véritable repos, c’est donc retrouver l’authentique sens du travail. L’homme n’est pas fait pour le travail, mais le travail est fait pour l’homme.
Cet article provient du magazine de juillet 2020.
Ce commandement du repos est une hérésie par rapport au culte de la productivité, aussi bien capitaliste que socialiste.
Les communistes en Russie s’y étaient d’ailleurs opposés. Ils proposaient certes des congés aux travailleurs, mais pas tous en même temps, pour que les machines ne cessent jamais de tourner. Mais aussi afin que les rassemblements familiaux, religieux et politiques deviennent quasi impossibles. Pourquoi ? L’individu devenait ainsi de plus en plus dépendant de l’État, puisqu’isolé des autres communautés qui pourraient l’aider dans ses difficultés, voire être des contrepouvoirs au régime totalitaire.
Comme quoi prendre des vacances peut être révolutionnaire !
Rien de nouveau sous le soleil. Les Romains accusaient déjà les juifs d’être des fainéants parce qu’ils ne travaillaient que six jours par semaine. Eh bien ! Soyons fiers de cette insulte qui remet en cause l’idole de l’efficience et de la croissance sans limites.
Si l’on a bien retenu la leçon de Jésus selon laquelle « l’homme n’est pas fait pour le sabbat », il semble que l’on ait oublié en contrepartie que le sabbat, lui, est fait pour l’homme. Voilà un commandement que l’on ne peut briser sans se briser.
Les temps sabbatiques sont des temps pour se poser et se re-poser. Des temps pour se positionner à nouveau dans l’existence, réordonner sa vie en retrouvant le sens des priorités.
Ce septième jour où l’on se repose avec Dieu nous fait passer du stade où l’on produit à celui où l’on jouit. Il est d’ailleurs considéré par les juifs comme un avant-gout des délices paradisiaques : un monde sans stress ni tristesse, sans coercition ni obligation. Un monde avec ceux qu’on aime : avec sa famille et avec Dieu, dans la louange et la fête.
Heureux les paresseux, car ils jouissent de Dieu ! Béatitude estivale où Dieu nous invite à prendre des vacances avec lui. Alors bon été, et surtout, reposez-vous bien !