Depuis que je suis mariée, je me pose de plus en plus de questions sur la manière dont je m’habille et, du même coup, sur la manière dont les filles et femmes autour de moi se vêtissent.
Je suis si fréquemment choquée ou troublée en regardant autour de moi que j’en arrive souvent à la conclusion que je suis devenue une frustrée, une puritaine.
Sans doute un peu.
Peut-être, au fond, que si j’avais de si belles jambes, je les montrerais autant moi aussi ? Ou des seins d’apparence aussi ferme, ou des fesses si bien définies… Mais mes observations soulèvent que ce ne sont pas seulement les filles/femmes répondant le plus aux standards de beauté qui se dévoilent le plus.
Passer par-dessus la réaction épidermique
Si mes études en histoire de l’art contemporain m’ont appris une chose, c’est bien à passer par-dessus ma réaction épidermique première pour me pencher plus attentivement sur la raison d’une réponse aussi forte de ma part. J’ai besoin de trouver la cause réelle de ma révolte.
Je pense que la première question à se poser, c’est : est-ce qu’on ne s’habille que pour soi ?
Certes, on choisit tel ou tel morceau parce qu’on le trouve confortable, avantageux, pratique, tendance, ou pour s’affirmer, pour s’afficher.
Ainsi, dès qu’on sort de chez soi, ce que l’on porte fait plus que nous couvrir. On s’en sert pour s’exprimer, pour exprimer qui on est, d’où on vient, quels milieux on fréquente, notre « style ».
Ce que je constate toutefois, c’est comment, malgré ce qu’on en dit, on s’habille presque toujours pour l’autre. On n’a qu’à regarder comment le « linge mou » a la cote depuis l’avènement du télétravail, ou comment même, pour certaines femmes confinées, de ranger leurs talons hauts (à cause du confinement) est associé à l’oisiveté de la femme au foyer. Comme je ne suis confrontée au regard de personne dans ma journée, pourquoi m’habiller dignement ? Pourquoi chercher autre chose que mon confort ?
Ainsi, dès qu’on sort de chez soi, ce que l’on porte fait plus que nous couvrir. On s’en sert pour s’exprimer, pour exprimer qui on est, d’où on vient, quels milieux on fréquente, notre « style ». Le cas qu’on a fait du coton ouaté de Catherine Dorion à la Chambre des communes illustre parfaitement ce que j’essaie de démontrer ici.
Il y a toujours un message
De ce fait, ce que l’on porte envoie toujours un message, que le destinateur en soit conscient ou non.
Et l’on peut se positionner de deux façons face à cet énoncé. Ou bien on le refuse carrément et on en fait fi, en se concentrant sur notre nombril et ce qui le cache (ou pas) selon nos gouts, notre confort… Ou alors on s’efforce de développer une sensibilité quant au message que nos culottes véhiculent.
C’est comme notre visage : il transmet toujours une expression. Que celle-ci soit le reflet de notre état réel ou non, nous sommes responsables de ce que nous projetons. Aussi, l’information n’est-elle pas toujours bien interprétée, mais du moment où on s’expose, elle est toujours perçue. Il faut garder ça en tête.
L’idée n’est pas de devenir obsédé de la signification des couleurs, des codes du col roulé ou du shoe clac. Ou encore de déresponsabiliser les regards pervers ou déplacés.
Mais comment peut-on honnêtement s’offusquer d’un regard insistant lorsque notre accoutrement crie à la provocation ? Je pense que nous partageons la responsabilité d’assumer autant ce que nous véhiculons avec nos paroles qu’avec notre image.
Et le fait est qu’il y a indéniablement et objectivement des vêtements qui, par leur modèle, leur taille ou leur tissu, dévoilent plus que d’autres, voire trop.
Si tu portes un jean qui te moule jusqu’à la craque de fesse, ou une robe en satin qui permet de discerner le moindre de tes grains de beauté, est-ce que tu es seulement en train de dire que tu t’entraines beaucoup et que tu es bien dans ton corps ? Non.
Sans doute que tu dis ça, mais pas que.
Aligner ce qu’on dit et ce qu’on est
Ça serait ça, la question à se poser quand on choisit la guenille du jour : qu’est-ce que je dis ?
Être honnête et digne, c’est peut-être ça, au fond, d’aligner le mieux possible ce qu’on dit avec ce qu’on est, avec qui on est.
Après ça, il y aura toujours des puritains et des obsédés. Mais la maturité est d’aller au-delà du cri d’affirmation de soi et d’accepter que notre façon de nous habiller fasse partie du dialogue avec l’autre. Il faut rester conscient de notre rapport aux autres.