Chaque fois qu’elle part en voyage, Brigitte Bédard rencontre des difficultés qui s’avèrent toujours être des moments de grâce. Alors qu’elle est partie en France pour la tournée promotionnelle de son récent livre Je me suis laissé aimer…, elle nous offre ses carnets de voyage. Premier d’une suite d’histoires à venir.
Le voyage avait pourtant mal commencé. J’arrive à la sécurité et on me retourne de bord : dans mon bagage en cabine, il y avait trop de liquide. Le garde me tend un ziplock en me disant que je dois mettre tous les liquides, gel, crème dans ce minuscule sac de plastique.
« Quoi ? Vous voulez rire ? Je suis une femme… j’ai besoin de plus de liquide que les hommes ! Déjà, comment se fait-il qu’il n’y ait pas de règles aériennes adaptées au genre ? Je vous le demande ! »
C’est ce que j’aurais aimé lui dire. Mais, comme on sait, il ne sert à rien de se battre contre les moulins à vent.
J’étais là, avec ma valise, à tenter de faire entrer ma multitude de petits pots, dans le minuscule petit sac de plastique. Il me dit que je dois, soit abandonner mes petits pots, soit les mettre dans ma valise en soute.
Moi qui étais si fière de dire que je voyageais sans bagage en soute ! Je voulais être libre comme l’air ! Au bout de dix minutes, le gars commençait à froncer les sourcils. Et moi, j’avais chaud.
J’étais prête à me défaire de tout, mais bon, j’ai compris, après tergiversations, que ça ne servait à rien : je devais tout remettre dans ma valise et retourner au comptoir d’Air France pour enregistrer mon bagage, moyennant (bonté divine !), quelques dizaines de dollars… grrr !
Une place au hublot
Je suis arrivée à la porte 55 essoufflée, épuisée, en sueur, et un peu de mauvaise humeur. Le seul point positif de tout ça, me disais-je, c’était qu’à la borne d’enregistrement, j’ai pu aider une pauvre femme qui en arrachait. Elle n’y comprenait rien. Je lui ai offert mon aide et elle m’a regardé comme si j’étais Jésus en personne : « Ah ! Ma Sauveuse ! », m’a-t-elle lancé. C’était le Bon Dieu qui me rappelait :
— Hey Brigitte !… Relaxe et laisse-moi faire. Laisse-toi aller.
— OK, lui ai-je répondu, je te promets que j’abandonne ma volonté. Drette là.
Une fois dans l’avion, j’arrive à mon siège et je dis, tout sourire, au jeune homme assis sur le siège côté allée : «Je vais être obligée de vous déranger ! Ma place est au hublot.»
Son ami, de l’autre côté de l’allée, me dit : « Ah ! Il est tellement dérangeant ! Ce sera bien fait pour lui ! » Je réponds du tac au tac : « Alors, on va bien s’entendre ! »
Je voyais ça comme un p’tit clin de Dieu. Regarde, Brigitte, tu passeras un voyage en bonne compagnie.
Rendre grâce
Je m’installe. Je fais mon appel à ma fille Eva. Je lui montre l’aile de l’avion, l’intérieur. On papote un brin. En guise d’au revoir, je la bénis, comme de coutume : « Sois bénie, ma fille d’amour ».
Je raccroche. Mon voisin se tourne vers moi :
« Vous venez de bénir votre fille ?
— Euh… oui.
— Vous êtes chrétienne ?
— Oui !
— Ça, par exemple ! Moi aussi !
— Quoi !?
— Je m’appelle Jean-Christophe, je suis baptiste. Nous allons, mon ami Rici et moi, en Roumanie pour organiser la logistique d’accueil des réfugiées ukrainiens avec le réseau des églises baptistes là-bas. Et vous ?
— Brigitte, je suis catholique. Je vais témoigner un peu partout en France, une tournée d’une dizaine de jours, pour raconter les merveilles du Seigneur dans ma vie, dans mon couple… »
On n’en revenait pas. On se réjouissait. On bénissait le Seigneur. Au bout d’une dizaine de minutes, Jean-Christophe demande :
« Connais-tu la gang du magazine Le Verbe ?
— Quoi ? Tu me niaises ?
— J’ai fait une chronique y’a pas longtemps sur le passeport sanitaire…
— Quoi ? C’était toi ? Mais moi… j’écris pour Le Verbe régulièrement !
— Quoi !? »
C’est là qu’on a enlevé nos masques. On s’est pris en selfie au bénéfice de la « gang du Verbe ». Pour dire combien Dieu est grand… quand on le laisse faire.
On a décollé. Le diner a été servi. Et tous les trois, unis et réunis, avec Lui, au milieu de nous, on a béni le repas.