Jésus est-il « woke » ?

En réponse au député de Québec Solidaire Haroun Bouazzi qui dénonçait un climat raciste qui règne selon lui à l’Assemblée nationale, le chef du Parti Québécois, Paul St-Pierre Plamondon (PSPP), l’a accusé d’être à la traine de l’idéologie woke. Ça fait plus de trois semaines que tout ça est arrivé, où en sommes-nous dans ce débat ?

Cet édito est tiré de notre émission « Les Verbomoteurs ». Visitez leur page pour voir les derniers épisodes.

Pas beaucoup plus loin qu’à ses débuts. Après que PSPP ait sorti le mot en W, on n’a pas attendu longtemps pour que le camp visé contrattaque en traitant ses adversaires d’antiwokes.

Tentant d’y voir plus clair et de se démêler dans ce qui est woke et ce qui ne l’est pas, les internautes et autres commentateurs en sont arrivés à dire que l’opposant au progressisme, c’est le réactionnaire.

À ce sujet, la journaliste d’extrême centre Hélène Buzzeti a fait remarquer que l’épouvantail miroir souvent utilisé à l’accusation woke est celui de l’extrême droite. Il semble même que le refus de vouloir étiqueter son adversaire et de le ranger dans une petite case soit désormais un symptôme de l’antiwokisme.

En gros, le débat ressemble un peu à ceci :

— Vous êtes racistes !
— Non, vous vous êtes wokes !
— Vous, vous êtes des réactionnaires d’extrême droite ! (Miroir)

Jérôme Lussier, le cofondateur de la plateforme Vaste Programme, désormais étiquetée antiwoke, écrivait cette semaine qu’autrefois, on posait la question dans le petit catéchisme : « Où est Dieu ? Dieu est partout. »

Aujourd’hui, poursuit-il, c’est pour plusieurs le wokisme qui semble être partout.

Il suffit d’aller lire l’infolettre d’Olivier Niquet du 29 novembre pour s’en convaincre. Woke est rendu un mot fourretout, aucunement défini, c’est un épouvantail utilisé autant par les politiciens que par les chroniqueurs pour critiquer ce qui tire à gauche.

L’ancien rédacteur en chef du VOIR, Simon Jodoin, a même proposé que le mot woke se retrouve dans les mots-cadenas, c’est-à-dire dans les mots qui, lorsqu’évoqués, verrouillent le sens et nous empêche d’avoir accès aux réalités que l’on souhaiterait nommer. Comme lorsque PSPP a traité Bouazzi de woke : la discussion s’est arrêtée, et elle a tout simplement bifurqué.

Mais le wokisme, c’est d’être éveillé aux injustices tout simplement, diront ceux qui en revendiquent la cause sans l’étiquette. Qui peut être contre la vertu ?  Personne, sauf les gens d’extrême droite, dira-t-on. Encore là, on met un frein ici à la discussion.

Cherchez-vous à sortir comme moi de cette impasse ? Et bien, la question que tout chrétien doit se poser devant un problème est : Que ferait Jésus ?

Notre collègue Laurence se demandait récemment si Jésus était un mâle alpha ? Je nous demande donc : Jésus ne serait-il pas un woke, lui le défenseur des humbles, des petits, des opprimés, la victime par excellence, celui qui rend la vue aux aveugles et qui apporte la lumière dans l’obscurité ?

Mais Jésus est le Verbe de Dieu fait chair, il est le logos comme on dit en grec. Il est l’ordre qui maintient toute la réalité du monde, la raison derrière toute chose. Il est le médiateur entre deux oppositions qu’il cherche à réunir, mais qui, en même temps, sépare pour ne pas les fusionner.

Un peu comme M. Bouazzi, Jésus avait des déclarations qui rendaient les gens furieux. Et comme PSPP, il confrontait ses détracteurs. Il ne les traitait pas de wokes cependant, mais d’hypocrites, d’incrédules ou d’engeances de vipères. Une fois, on dit même que des gens ont voulu le jeter en bas d’une falaise, mais il a continué son chemin en passant au milieu d’eux, créant de cette manière deux groupes : des gens à sa gauche et d’autres à sa droite.

Or, les erreurs viennent toujours en paires opposées nous dit CS Lewis :

Woke ou antiwoke, progressisme ou réactionnaire, gauche ou droite; on passe notre vie à se demander lequel des deux côtés est le meilleur ou le pire. Et c’est là un piège, parce que le dégout que nous éprouvons pour l’un nous mène à l’autre.

Gardons donc les yeux bien ouverts, veillons en ce temps de l’Avent, soyons véritablement éveillés ou woke à la manière de Jésus et continuons notre chemin en évitant les travers, d’un bord… Comme de l’autre !

James Langlois

James Langlois est diplômé en sciences de l’éducation et a aussi étudié la philosophie et la théologie. Curieux et autodidacte, chroniqueur infatigable pour les balados du Verbe médias depuis son arrivée en 2016, il se consacre aussi de plus en plus aux grands reportages pour les pages de nos magazines.