La fin du show

Jésus est-il un mâle alpha?

Le documentaire Alphas, sorti dernièrement à Télé-Québec, donne un rôle privilégié à Jésus. Pourquoi ? Parce que Jésus influencerait nos influenceurs masculinistes québécois.  

Cet édito est tiré de notre émission « Les Verbomoteurs ». Visitez leur page pour voir les derniers épisodes.

Sauf que si Jésus a bien un rôle, c’en est un muet. Le documentaire s’intéresse peu à la doctrine chrétienne, sauf peut-être au moment de citer un verset en particulier, celui qui fait saigner les oreilles de toutes les féministes du Québec en ce moment : je parle de « femmes, soyez soumises à vos maris », dans la lettre de saint Paul aux Éphésiens.

Un autre homme s’est vu attribuer un rôle encore plus important dans le documentaire : Andrew Tate. Lui, il est loin d’être muet. Et lui aussi dit que la femme doit se soumettre.

Ressemblance n’est pas identité

Mais alors, Jésus et Andrew Tate : same thing ? (Je vais utiliser quelques expressions anglaises dans cet édito, pour mieux me faire comprendre des mâles alphas.)

Eh bien, rappelons d’emblée que ce n’est pas parce que tout citron est jaune et que ma voiture est de cette couleur qu’elle est un citron. Ou encore, ce n’est pas parce qu’Antoine est chauve et qu’Andrew Tate l’est aussi qu’Antoine est un masculiniste. Quoique, sa femme est à la maison, je pense?

Sans blague, même si Antoine est catholique, c’est clair qu’il n’est pas un masculiniste comme Andrew Tate. Déjà, je soupçonne qu’il ne fait pas le même salaire, qu’il n’a pas la même shape et qu’il n’a jamais fait d’exploitation sexuelle sur Onlyfan

Si, pour être un mâle alpha, il faut faire partie du 1% autant en richesses qu’en fitness, comme le suggère Andrew Tate, je vous garantis cependant que l’exigence chrétienne est plus basse. Déjà, Jésus, ce n’était pas le plus riche en ville.

Le verset tabou

Ceci dit, une question demeure : on fait quoi du fameux verset « femmes, soyez soumises à vos maris » ? Antoine, en bon catholique, demande-t-il à sa femme de se soumettre ?

Mais, laissons-le tranquille et ne le mettons pas injustement sur le hot seat. De toute manière, il utiliserait sans doute la réponse « miroir » : et toi es-tu soumise à ton mari?

Alors, au risque de scandaliser mes millions de lecteurs : oui, je crois en Éphésiens 5.

Mais rassurez-vous, ça ne change pas grand-chose dans mon mariage. Même si, en même temps, ça change tout. Vous me suivez ?

En fait, ça ne change pas grand-chose, parce que, je vous donne un scoop : mon mari et moi sommes pratiquement toujours en accord sur les décisions importantes. C’est un peu pour ça qu’on s’est marié d’ailleurs…

(Bon, c’est vrai que des fois j’aurais envie de me trémousser toute la nuit au Dagobert en petit habit coquin, mais que par soumission à mon mari, je me retiens. Mais c’est le seul point de discorde !)

Ça ne change rien, et ça change tout, disais-je. Pourquoi ? C’est que, sans ce verset, je vous le garantis, il y aurait quand même un chef dans notre mariage. Parce que, qu’on le veuille ou non, ça prend toujours un « leader »  dans un couple. La question revient seulement à déterminer qui.

Or, sans Éphésiens 5, madame, ici présente, chef des bécosses par excellence, exercerait sa tyrannie. Et je ne suis pas sure qu’on y gagnerait au change.

Je le pense sincèrement : Éphésiens 5 sauve mon mariage. Cette parole biblique transforme mon regard, unit mon couple, surtout quand on connait la suite : saint Paul demande aux maris de se sacrifier pour leur femme, comme Christ l’a fait pour nous !

Mes propos genrés vous heurtent ? Ne vous inquiétez pas : le christianisme ne verse pas dans la caricature et accepte une malléabilité.

C’est sûr qu’il y a des rôles définis. Je vous l’avoue, c’est moi qui porte, accouche et allaite tous nos bébés. Et c’est mon mari qui se lève 36 millions de fois pour aller me chercher de l’eau, une collation, un autre coussin, etc., quand je viens d’accoucher.

Mais mon mari est capable aussi de changer des couches. Et moi je pourvois aussi à ma famille, par exemple en ce moment même où j’empile le gros cash grâce à cet édito.

Jésus : l’Alpha des alphas

Mais revenons à Jésus : mâle alpha ou non, finalement ? Je dirais oui. Mais pas comme une caricature grossière. Pas comme un tas de muscles qui multiplie les clickbait sur les réseaux pour le fame.

Jésus, c’est le vrai Alpha, capable tout autant de remettre les pharisiens à leur place que de se sacrifier pour ceux qu’il aime. Il est le plus grand, et en même temps le plus humble. Il est l’Alpha et l’Omega.

Laurence Godin-Tremblay

Laurence termine présentement un doctorat en philosophie. Elle enseigne également au Grand Séminaire de l’Archidiocèse de Montréal. Elle est aussi une épouse et une mère.