En 2025, soyez immortels!

Le 1er janvier, Netflix a sorti le documentaire « Don’t Die : L’homme qui voulait être éternel », sur la vie de Bryan Johnson, un entrepreneur dépensant plus de 2 millions par année pour « rajeunir » et ne jamais mourir.

Cet édito est tiré de notre émission « Les Verbomoteurs ». Visitez leur page pour voir les derniers épisodes.

Ce documentaire m’a inspiré ma résolution de 2025 : devenir immortelle. Impossible me direz-vous ?

Au contraire ! À cette heure même, tout est accompli. C’est bien la première fois que je tiens une résolution aussi facilement.

Et si vous voulez, je peux vous partager mon secret pour ne jamais mourir. C’est même beaucoup moins cher que tous les produits que vend Bryan Johnson sur sa page. (Parce que, disons-le, son projet, c’est plus du marketing que de la science.)  

Mais passons ! Que devez-vous faire pour devenir éternel ? Rien ! Vous n’avez rien à faire, vous l’êtes déjà !

Le corps a une date de péremption

Bon, peut-être que certains se disent que je n’ai pas encore retrouvé mes esprits depuis le temps des fêtes. Trop de vin et trop de bébés malades. Trop de tourtière et pas assez de sommeil.

C’est pourtant évident, me direz-vous, que nous allons tous mourir un jour. Je ne peux d’ailleurs pas nier que je vieillis quand j’ai peur de m’uriner dessus à chaque fois que je tousse un peu trop fort. (Effet collatéral de la douce naissance de mes trois enfants, que je salue d’ailleurs.)

Je comprends vos arguments. Le corps dépérit. Que voulez-vous, le corps, il a une date de péremption ! On peut bien tenter de le conserver le plus longtemps possible : manger équilibré, dormir huit heures par jour, s’activer, etc.

Ou, pour les plus motivés comme Bryan Johnson : ingurgiter 120 pilules par jour et échanger un litre de plasma avec son fils dans une clinique privée en Amérique du Sud. Beaucoup d’efforts et de temps pour aboutir cependant au même résultat… Riche ou pauvre, en santé ou malade, on finit tous dans la tombe.

Mais alors, elle est où la solution ? L’âme, chers lecteurs, l’âme ! C’est elle qui est immortelle, pas le corps.

Mais là, je vous vois déjà prêt à mettre fin à votre lecture. Pas une autre fanatique religieuse ! Même Bryan Johnson décrocherait s’il m’entendait : ancien mormon, il en a soupé de l’après-vie.

Alors quoi ? Admettons, hypothétiquement, que l’âme subsiste après la mort du corps, on fait quoi ? On se laisse aller ? Big Macs, cigarettes, nuits blanches… Pourquoi prendre soin de son corps si on aboutit tous en fin de compte au même résultat ?

C’est là que le message de Bryan Johnson, si on applique un peu de charité herméneutique, comporte une part de vérité. C’est clair qu’il ne faut pas se négliger soi-même. Et certes, il faut honorer cette vie. En jouir même !

Mais je ne suis pas sure que la meilleure façon de le faire soit celle de Johnson. Il remarque d’ailleurs lui-même le paradoxe : toutes les études soulignent que l’amitié et les relations augmentent l’espérance de vie, mais personne, ou presque, ne veut partager son mode de vie psychorigide. (Traduction libérale : il ne se trouve pas de copine.) Oups !

Le désir naturel de vivre pour toujours

Soulignons tout de même une autre qualité de Johnson : son grand désir de vivre toujours, d’exister toujours, d’aimer toujours.

Selon C.S Lewis, intellectuel britannique et auteur, entre autres, de Narnia, ce désir naturel que tous portent, pointerait vers notre immortalité réelle. Je le cite :

« Les créatures ne naissent pas avec un désir à moins que la satisfaction de ce désir existe. Un nourrisson ressent la faim, eh bien il existe une telle chose que la nourriture. Un caneton veut nager, eh bien il existe une telle chose que l’eau. L’être humain ressent des désirs sexuels, eh bien il existe une telle chose que le sexe. Si je retrouve en moi un désir qu’aucune expérience en ce monde ne peut satisfaire, l’explication la plus probable c’est que j’ai été fait pour un autre monde. »

Évidemment, ça ne signifie pas que tout désir comporte son objet. J’aimerais bien vivre dans un pays à la fois enneigé et chaud, mais c’est impossible. Ou bien, je voudrais continuer de faire la philosophe, mais être riche. Encore plus impossible.

Non, tout désir ne renvoie pas à un objet réel. Mais ceux que tout être humain trouve en lui dès l’origine – les désirs naturels –, oui, selon Lewis. Le contraire rendrait la vie absurde ! Comme le pensait Albert Camus d’ailleurs.

Je ne vous ai pas convaincus ? C’est juste un édito de 800 mots, après tout. Si vous êtes insatisfaits, faites-en votre résolution de 2025 : devant le désir de vivre pour toujours et la mort inéluctable, quelle sera votre réponse ?

Laurence Godin-Tremblay

Laurence termine présentement un doctorat en philosophie. Elle enseigne également au Grand Séminaire de l’Archidiocèse de Montréal. Elle est aussi une épouse et une mère.