Auteure, conférencière et animatrice, Christine Michaud est particulièrement connue pour ses vingt années de présence à la télévision québécoise (Salut Bonjour/Qu’est-ce qu’on attend pour être heureux ?/Ma liste à moi). Aujourd’hui, elle donne des formations en psychologie positive tout en se consacrant à l’écriture. Nous l’avons rencontrée à l’occasion de la sortie de son plus récent livre Choisir la joie et la légèreté dans lequel elle raconte comment des expériences difficiles de sa vie l’ont métamorphosée. Un témoignage de foi et d’espérance pour illustrer notre formidable capacité à pivoter de l’ombre vers la lumière.
Simon Lessard : Tu te présentes sans gêne dans les médias comme une femme de foi. D’où vient cette foi ? Est-ce que ta famille était très croyante ?
Christine Michaud : Je suis née à Québec dans une petite famille de classe moyenne. Mes parents étaient tous deux fonctionnaires et pas si croyants ni pratiquants. Toute mon histoire de spiritualité vient plutôt de ma grand-mère maternelle, parce qu’elle a beaucoup pris soin de moi quand j’étais petite. J’aimais sa foi et sa façon de m’en parler.
On parle parfois de synchronicités de la vie, moi j’appelle ça des clins-Dieu.
Par exemple, elle m’avait montré à prier le chapelet le soir avant de dormir. Un jour, je lui ai avoué que je m’endormais trop vite et que je n’arrivais pas à terminer mes prières. Elle est partie à rire, elle m’a prise dans ses bras, et m’a dit : « Pauvre petite fille, fais-toi s’en pas avec ça. Les anges le finissent pour toi ! » « Même si je ne suis pas allée loin, grand-maman ? » lui ai-je demandé. Elle m’a répondu : « Non, ça ne change rien, si ton intention est là. »
C’est le genre de foi à laquelle elle me ramenait tout le temps. La blague que j’ai souvent faite après, c’est que j’aimerais que les anges finissent d’autres affaires pour moi, comme mes devoirs !
Quel héritage spirituel t’a-t-elle légué ?
La dernière fois que je suis allée visiter ma grand-mère à l’hôpital, je suis repartie avec la certitude que je ne la reverrais pas. Je suis arrivée à la maison autour de minuit. Juste avant d’arrêter la voiture, il y avait une chanson que je n’avais jamais entendue qui a joué à la radio.
J’ai pris le temps de l’écouter. C’était « Le miracle » de Céline Dion. J’écoutais les paroles et je n’en revenais pas. Je me disais que si ma grand-mère avait écrit une chanson, elle aurait écrit celle-là. Elle raconte ce qu’elle m’a répété toute ma vie :
Au-dessus de nous, dedans et tout autour
Le miracle est partout, mon amour
Sauras-tu le voir ?
Peu de temps après être entré dans ma maison, le téléphone a sonné. Un de mes oncles m’apprenait que mamie était décédée, et quelques instants après une étoile filante a traversé le ciel. C’est la seule étoile filante que j’ai vue de ma vie !
Dans tout ce que j’ai vécu de plus difficile dans ma vie, ce qui m’a toujours soutenu, c’est ma foi.
Tu sais, on parle parfois de synchronicités de la vie, moi j’appelle ça des clins-Dieu. Je me suis dit : « Jusqu’à la fin, elle a été extrêmement présente et marquante dans ma foi. » Elle m’a fait comprendre que croire ça vient avec beaucoup de joie et de légèreté. Ce n’est surement pas un hasard si mon plus récent livre porte justement le titre Choisir la joie et la légèreté. C’est vraiment ce que ma grand-mère m’a apporté, elle qui me disait tout le temps : « Il faut voir le beau, apprécier le bon et faire le bien. »
Pourtant, la vie est souvent triste et lourde ?
C’est vrai. Mais je dirais que dans tout ce que j’ai vécu de plus difficile dans ma vie, ce qui m’a toujours soutenu, c’est ma foi. J’ai des moments précis où je me revois pleurer et être complètement découragée. Mais en même temps une lumière était toujours là. Même dans mes larmes les plus tristes et souffrantes il y avait toujours cette lumière. C’est aussi pour ça d’ailleurs que j’ai écrit ce nouveau livre, pour transmettre ce message que c’est rarement tout noir ou blanc.
On pense parfois que quand on est dans la souffrance on ne peut pas ressentir la joie. Mais non ! La joie peut cohabiter avec la souffrance au même moment. C’est extrêmement difficile à expliquer, mais c’est ça qui est tellement beau, je trouve.
Ça me fait penser aux douleurs et à la joie d’une femme qui accouche.
C’est un bon exemple, en effet. Ce qui aide aussi, c’est de croire que les choses arrivent toujours pour une bonne raison. Il faut être capable d’identifier les évènements et les périodes les plus souffrantes de sa vie et saisir ce que cela nous a donné de positif sur le long terme. C’est ma théorie des cadeaux mal emballés de la vie.
As-tu un exemple de cadeau mal emballé dans ta vie ?
À 28 ans, j’ai fait un burnout ou une dépression qui a duré deux ans. Même si je n’allais vraiment pas bien, même s’il m’arrivait de me demander si j’allais finir par m’en sortir, j’avais toujours la foi qui m’empêchait d’avoir des idées suicidaires.
Cette dépression m’a amenée à une quête sur qui j’étais et sur ce que j’étais venue faire sur cette terre. Avant cela, j’étais toute mêlée au-dedans. Je ne savais pas du tout qu’elles étaient mes qualités et mes forces. J’avais l’impression que je n’avais pas ma place, que je n’étais pas aimée. J’étais beaucoup trop dans la performance et je pense que c’est pour ça qu’à un moment j’ai frappé un mur. Mais grâce à ma foi, c’est comme si je me disais : « Garde confiance parce que ça n’arrive pas pour rien. Il y a quelque chose d’autre, ça va me mener quelque part. » C’est ça qui a nourri mon espoir tout le long.
Est-ce que ta dépression a changé quelque chose dans ton approche de la vie ?
Oui, énormément. En fait, ça a été le début de la fissure de mon égo. Je pense que dans toute mon enfance j’ai été en mode « être une bonne petite fille ». Tout ce que j’avais fait jusqu’à mes 18 ans, c’était pour faire plaisir à d’autres. Faire plaisir à mes parents, faire plaisir à mes chums. Donc, la dépression est venue casser cette espèce de pattern. Ça m’a amenée à plus d’authenticité et à accepter ma vulnérabilité.
Je dis que c’est un cadeau la dépression, parce qu’aujourd’hui je sais que j’ai cette fragilité. Ça m’évite de me rendre trop loin, de me pousser à bout pour rien. Quand je vois des drapeaux rouges se lever, je m’assure de rester dans ma voie, dans mon cœur, dans ce que j’aime. Bref, cette épreuve est devenue un immense cadeau et c’est pourquoi aujourd’hui j’ai tellement envie de parler d’amour.
As-tu toujours eu cette envie de parler d’amour ?
D’une manière, oui. Quand j’avais six ans, j’étais à la messe avec ma grand-mère et je lui ai dit : « Mamie, j’aimerais ça aller parler en avant. » Elle m’a alors demandé : « Et tu leur parlerais de quoi si tu allais en avant ? » Et moi de lui répondre : « Je parlerais de l’amour, mamie ! »
Ma grand-mère m’a rappelé ce souvenir sur son lit de mort et elle a ajouté : « Promets-moi une chose, que tu vas toujours continuer de parler d’amour. » Ça, pour moi, c’est extrêmement marquant et je trouve que ça résume parfaitement l’apport de ma grand-mère dans ma vie.
On manque de confiance et c’est pourquoi on pense qu’il faut tout contrôler. Mais au fond, on se prend pour Dieu quand on fait ça. Alors que si on se place davantage dans l’amour, tout d’un coup tout se place, le meilleur arrive, même si ce n’est pas nécessairement le meilleur tel qu’on l’avait imaginé.
Aujourd’hui, avec le métier que je fais, que j’enseigne la psychologie positive ou que j’écrive des livres, j’ai l’impression que je parle tout le temps d’amour. Mon intention profonde, c’est de semer plus d’amour en ce monde. Que les gens parviennent à se sentir profondément aimés. Qu’ils soient amour dans toutes les facettes de leur vie.
Il y a une phrase de saint François de Sales qui me suit tout le temps : « Rien par force, tout par amour. » Ça revient encore et toujours à l’amour ! Mais combien de fois force-t-on ? On manque de confiance et c’est pourquoi on pense qu’il faut tout contrôler. Mais au fond, on se prend pour Dieu quand on fait ça. Alors que si on se place davantage dans l’amour, tout d’un coup tout se place, le meilleur arrive, même si ce n’est pas nécessairement le meilleur tel qu’on l’avait imaginé.
Qu’est-ce qui selon toi pourrait le plus changer positivement notre monde ?
Un ami prêtre m’a dit un jour : « Imaginez un monde où les êtres humains se sentiraient profondément aimés. Comment mèneraient-ils leurs vies ? » Ça change tout, parce que souvent on sait bien que les êtres humains qui n’agissent pas de la bonne façon, qui sont méchants ou blessants, ils sont ainsi parce qu’ils sont eux-mêmes blessés à l’intérieur. Et la plus grande blessure, c’est l’impression de ne pas être aimé, de ne pas être vu, de ne pas être apprécié. Je pense qu’il y a tout un travail à faire dans notre société par rapport à ça. C’est une question extrêmement importante qui peut vraiment tout changer.
Bref, je suis convaincue que plus il y aura de personnes qui auront la foi, mieux notre monde va se porter. Que ce soient la foi chrétienne ou d’autres, mais que ce soit lié à l’amour. La racine, c’est l’amour. Comment puis-je être davantage dans l’amour ?
J’ai écrit un livre qui s’intitule Le Miracle et le sous-titre est Que ferait l’amour ? C’est une sœur du collège Jésus-Marie où j’ai passé mon adolescence qui nous posait souvent cette question quand on se chicanait. Je trouvais ça ridicule à 14 ans, car je ne comprenais pas le sens profond de la question. Mais aujourd’hui, j’ai tout le temps ça en tête. Si je suis face à quelqu’un qui est méchant ou impatient et que je suis tentée de répondre sur le même ton, alors je me pose cette question : « Que ferait l’amour ? » Si je peux agir dans l’amour, ça change tout.