Photo: Simon Lessard

Les Augustines et les Ursulines perpétuent la plus ancienne amitié au Canada

Le 23 novembre dernier à Québec, les deux équipes du Monastère des Augustines et du Pôle culturel du Monastère des Ursulines se sont réunies pour la signature d’un acte d’amitié. Un geste symbolique et concret qui manifeste le désir de poursuivre l’union de charité qui perdure depuis 383 ans entre les deux communautés religieuses.

Cette très belle et longue histoire d’amitié débute sur un navire entre trois sœurs augustines et trois sœurs ursulines. C’est en effet à bord du bateau Saint-Joseph que les toutes premières sœurs en Amérique du Nord peuvent faire connaissance durant les trois mois de la traversée, avant de débarquer à Québec le 1er aout 1639. Depuis, leur relation d’amitié est demeurée intacte et fidèle.

Avec leur charité active, que ce soit par les soins aux malades pour les Augustines ou par l’éducation des jeunes filles pour les Ursulines, les religieuses ont apporté conjointement leur aide au développement de la jeune colonie.

Fidèles dans la joie comme dans l’épreuve

À travers les siècles, Augustines et Ursulines se soutiennent lors de divers évènements heureux et douloureux.

En 1650, le monastère des Ursulines de Québec passe sous les flammes et les Augustines accueillent chez elles leurs sœurs qui se retrouvent à la rue. C’est cette solidarité dans l’épreuve qui les inspire à sceller leur amitié par un premier acte d’union le 8 février 1651, afin de «conserver une perpétuelle et indissoluble union et charité entre les deux communautés.»

Signe de leurs liens étroits dans la foi et la mission, cet acte sera renouvelé à plusieurs reprises au fil des siècles, dont le 31 juillet 2015, à l’occasion du 375e anniversaire de l’arrivée des sœurs fondatrices.

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Premier acte d’amitié entre ursulines et augustines signé le 8 février 1651. Photo: Pôle culturel du monastère des Ursulines

À l’occasion de nombreuses célébrations, jubilés et commémorations, elles se visitent afin de prier et de fraterniser ensemble. Elles partagent aussi leurs savoirs et expertises. Ainsi, des augustines de Chicoutimi iront se former chez les Ursulines de Roberval afin de tenir leur propre école ménagère, alors que certaines Ursulines seront stagiaires à l’école d’infirmerie de l’Hôtel-Dieu de Québec.

Au moment de la guerre de la Conquête, Québec étant à feu et à sang, les deux communautés se réfugient ensemble chez les Augustines, à l’hôpital général de Québec.

Sœurs Monique Pelletier et Lise Tanguay nous révèlent deux anecdotes d’amitié entre leurs communautés.

De même, l’une des plus belles preuves de cette amitié indéfectible a lieu au mois de mars 2002, quand le monastère des Ursulines de Roberval est incendié. Les Augustines de Roberval les accueillent immédiatement, et ce, pendant neuf années.

Ce fut une grande épreuve. Il y a eu des victimes dans l’incendie. Le monastère est passé au feu en avant-midi, et dès 11 heures, nos sœurs trouvaient refuge chez les Augustines. Elles avaient déjà tout préparé leur chambre et un repas pour bien les accueillir. Cela m’a tellement touchée que même si cela fait 20 ans, je me rappelle encore tous les détails de cette journée mémorable.

Sœur Pelletier

Passeurs de mémoire

C’est pour que cette union continue à porter du fruit que les deux institutions muséales ont décidé à leur tour de signer un acte d’amitié le 23 novembre dernier. Les responsables laïcs souhaitent ainsi perpétuer leur esprit de bienveillance, d’ouverture, de résilience, d’audace et de courage.

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Signature de l’acte d’amitié par Josée Laurence du Monastère des Augustines et Sophie Limoges du Pôle culturel du Monastère des Ursulines. Photo: Simon Lessard

De manière plus concrète, elles se sont aussi engagées à tenir une rencontre amicale tous les cinq ans, à assurer une mise en valeur commune annuelle par les réseaux sociaux, à garantir un partage des connaissances et des ressources matérielles et, enfin, à se pourvoir une aide mutuelle en cas de sinistres.

Pour la directrice générale du Monastère des Augustines Josée Laurence, «cette histoire entre les deux communautés religieuses se traduit maintenant de belle façon par les riches relations professionnelles et amicales entre les équipes du Pôle culturel du Monastère des Ursulines et du Monastère des Augustines.»

«Cet acte d’amitié aujourd’hui symbolise une continuité qui ne s’arrêtera pas», confie sœur Lise Tanguay, supérieure générale des Augustines du Québec. «Cette amitié est inscrite profondément dans nos cœurs et cela va toujours demeurer. C’est un acte d’amitié éternel : on est arrivées sur le même bateau et on espère qu’en haut, on sera sur le même bateau aussi !»

Photo souvenir avec des représentants des deux communautés. Photo: Simon Lessard

Même enthousiasme du côté de la conseillère générale des Ursulines, sœur Monique Pelletier : «C’est vivant, l’acte d’amitié. L’équipe à qui l’on transmet notre patrimoine a vraiment à cœur de poursuivre selon les valeurs qui nous sont chères. Ce sont des gens passionnés.»

«On ne fera pas notre Nunc dimittis1tout de suite», ajoute sœur Lise, sourire aux lèvres. «On continue à vivre. Mais on est comme des parents heureux de transmettre l’héritage. Il est entre bonnes mains et il va continuer de se transmettre.»

«Un ami fidèle, c’est un refuge assuré, celui qui le trouve a trouvé un trésor.» (Si 6,14-15)

Pour aller plus loin:
Il est possible de découvrir cette histoire d’amitié singulière et séculaire grâce au documentaire Âmes sœurs, disponible sur Savoir médias et en baladodiffusion.

+ Jusqu’au 26 février, dans chacun des deux musées, des vitrines contenant des lettres et des photos témoignant de cette solidarité sont présentées au public.

+ Un passeport « Âmes sœurs » a aussi été créé afin de découvrir à moindre cout l’héritage captivant de ces deux communautés religieuses féminines. Sur présentation d’un billet d’entrée acheté dans l’un des deux monastères, l’accès au second sera désormais réduit de 50%.

Simon Lessard

Simon aime entrer en dialogue avec les chercheurs de vérité et tirer de la culture occidentale du neuf et de l’ancien afin d’interpréter les signes de notre temps. Responsable des partenariats pour le Verbe médias, il est diplômé en philosophie et théologie.