film handicapé
Photo : David Koskas

« Un p’tit truc en plus » : éloge de la différence

Depuis quelques semaines déjà, le film Un p’tit truc en plus trône au sommet du boxoffice français. En date du 7 juin, il comptait pas moins de six-millions d’entrées! Malgré un départ plus discret de notre côté de l’Atlantique, la salle était néanmoins pleine à craquer au cinéma la semaine dernière. Il faut croire que le mot commence à se répandre : ce film est un réel petit bijou! 

Coscénarisé et réalisé par Artus, un humoriste bien en vogue dans l’Hexagone, le long-métrage Un p’tit truc en plus raconte l’histoire d’un père et de son fils qui, en cavale après un braquage qui ne se déroule pas comme prévu, se retrouvent dans un camp de vacances avec un groupe de personnes handicapées pour éviter de se faire arrêter par la police. Le fils essaie de se faire passer pour un handicapé et son père, pour son accompagnateur. 

Si la prémisse est simple et semble rigolote, le film relève du pur génie.

Bien sûr, on se bidonne tout au long de ces situations cocasses qui assaisonnent les journées de ces trisomiques et autres porteurs de déficiences diverses. Bien sûr, on devine rapidement que les deux criminels se lieront facilement d’amitié avec la joyeuse bande qu’ils accompagnent d’abord à reculons. Évidemment, tous ces personnages sont particulièrement attachants. 

Rentrer dans un moule… inversé

Mais le véritable génie de ce film se trouve avant tout dans le scénario. C’est que, dans cette histoire, les rôles sont inversés : c’est Sylvain, le fils criminel, qui doit « rentrer dans le moule » pour avoir l’air handicapé.

L’ayant rapidement démasqué, ses amis trisomiques lui prodiguent des conseils et des trucs pour qu’il perfectionne son look de handicapé, afin d’éviter qu’il ne se fasse démasquer par les accompagnateurs du groupe. 

Les « normaux », dans ce camp, ce sont les invalides. Quelle fraicheur! Même les éducateurs spécialisés ont tous quelque chose de bizarre. 

Il faut savoir qu’Artus, dont la belle-sœur est lourdement handicapée, s’est fait connaitre en interprétant sur scène un trisomique nommé Sylvain, et grâce à un autre sketch où il parle du handisport (comme les jeux paralympiques). Pour lui, il ne s’agit pas de rire aux dépens des personnes handicapées. Au contraire, il les considère comme des personnes « normales », et donc, il rit de leurs particularités comme il fait des gags sur les joueurs de rugby et autres personnes valides.

Des non-acteurs « d’expérience »

D’où l’idée de ce film, où les personnes handicapées font partie de la farce. D’ailleurs, tous les personnages handicapés sont joués par des non-acteurs eux-mêmes tous handicapés, que le réalisateur a découverts et dont il s’est inspiré pour créer ses personnages. Qu’on pense seulement à Arnaud, grand admirateur de Dalida, à Ludo et son problème d’inhibition qui entraine des grossièretés exprimées sans retenue, ils ont tous ce p’tit truc en plus qui les rend irrésistibles. 

Certes, plusieurs gags sont faciles et grossiers et le style peut déplaire à certains. D’autres pourront aussi parfois éprouver un malaise en entendant le père criminel dire tout haut ses jugements par rapport aux jeunes qu’il accompagne, par exemple.

Mais il reste que ce film apporte un point de vue extrêmement rafraichissant et humain sur le handicap mental et ouvre même déjà des discussions sur la place des personnes handicapées dans le milieu du cinéma en France, entre autres. 

Un film à voir absolument pour passer du bon temps sur le moment, et réfléchir longtemps après. 

Photos : David Koskas

Florence Malenfant

Détentrice d'un baccalauréat en histoire de l'art à l'université Laval et d'un certificat en révision linguistique, Florence a une affection particulière pour le bouillon de poulet et un faible pour la littérature russe!