Bien avant la harpe, la Guinness, le whiskey, la couleur verte et le Leprechaun, le trèfle est le symbole par excellence de l’Irlande. Son histoire est intimement liée à celle d’un saint que nous connaissons tous de nom : Patrick d’Irlande. Je vous propose d’en explorer les origines.
Comme souvent lorsqu’il s’agit des saints de l’Antiquité et du Moyen Âge, la tradition et les sources rapportent une histoire qui mélange à la fois réalité et mythe. De cette composition sort un récit hagiographique extraordinaire.
Une biographie de voyageur
Selon les sources médiévales (le Liber Angeli, la Vita sancti Patrici et Le Livre d’Armagh), Patrick serait né vers 386 en Bretagne insulaire.
Adolescent, il se fait enlever par des pirates lors d’un raid et il est emmené de force en Irlande. Il y est vendu à un fermier comme esclave et y passe quelques années. À 22 ans il parvient à s’enfuir et à retourner en Bretagne.
La tradition nous apprend que c’est à la suite d’un rêve qu’il décide de se faire prêtre afin de convertir les païens irlandais. Une fois ordonné, il obtient le titre d’évêque évangélisateur et se rend en mission en Irlande.
En parcourant le territoire irlandais, Patrick et d’autres missionnaires convertissent peu à peu son peuple. Ils évangélisent et construisent avec le peuple des églises et des monastères qui conserveront de nombreux écrits anciens. Il réussit à obtenir de nombreux alliés issus de la noblesse.
On ne sait pas en quelle année est mort saint Patrick. Certaines sources proposent 461, mais d’autres le font mourir plus que centenaire, en 496 !
Et le trèfle dans tout ça ?
Avant la mission de Patrick, les populations celtes d’Irlande étaient déjà en présence d’une iconographie païenne figurant des triades. On n’a qu’à penser aux symboles du triquetra et du triskell, utilisés depuis le néolithique pour représenter, en autres choses, le mouvement solaire : levé, zénith, couché. Bref, chez les Celtes, on était déjà habitué aux triades représentant un seul concept.
Le trèfle comme emblème de la nation irlandaise tirerait son origine d’un sermon prononcé par saint Patrick au Rock de Cashel.
Conscient du bagage iconographique existant, Patrick se serait servi d’un autre symbole triple, le trèfle, pour expliquer aux païens irlandais le concept chrétien de la Trinité divine. L’idée est toute simple. La plante, connue des populations agricoles, compte trois parties qui forment un tout indissociable. Il faut trois lobes pour former un seul trèfle, de même que pour les chrétiens le Père, le Fils et le Saint-Esprit sont un seul Dieu.
Bien que la véracité historique du sermon soit matière à débat, la simplicité de la comparaison pour expliquer un dogme fort complexe théologiquement est quant à elle indéniable.
Un symbole populaire
La tradition rapporte aussi que Patrick aurait fait sculpter un trèfle en haut de la porte de l’église d’Armagh. L’édifice, où il célébrait comportait d’ailleurs un chevet formé d’une abside flanquée de deux absidioles, donc de trois lobes. Pour le dire plus simplement, le chevet était en forme de trèfle !
La simplicité de la comparaison pour expliquer un dogme fort complexe théologiquement est quant à elle indéniable.
Il va sans dire que l’église, toujours selon la tradition, était sous le patronage de la Trinité.
Iconographiquement, les attributs de Patrick sont la mitre, la crosse de l’évêque et le trèfle. Il tient généralement celui-ci dans sa main ; cela rappelle, de manière visuelle, son usage pendant le sermon.
Saint Patrick, chasseur de serpents
La tradition raconte également qu’après le sermon, Patrick a offert sa bénédiction au peuple d’Irlande et qu’à ce moment précis tous les serpents auraient fui l’ile.
Ce récit, qui peut sembler quelque peu suspect, représente symboliquement la conversion du peuple irlandais.
Tout comme dans le récit du péché originel d’Adam et Ève, le serpent symbolise ici le Malin. Si le récit mentionne que tous les serpents quittent l’ile, c’est pour démontrer la force du sermon, par lequel tout le peuple irlandais a renoncé à Satan en se convertissant au christianisme.
Il serait illusoire de penser que tous les Irlandais aient assisté en même temps au sermon et que tous se soient convertis au même moment. Il est beaucoup plus réaliste d’affirmer que l’image du trèfle ait en réalité servi à saint Patrick et aux autres missionnaires à diverses occasions et un peu partout sur le territoire irlandais.
Dernier petit fait intéressant, la Saint-Patrick n’est pas officiellement la fête des Irlandais. En effet, l’État irlandais laïc ne possède pas de fête nationale comme l’est le 24 juin pour les Québécois. Je vous souhaite tout de même une bonne Saint-Patrick à tous !
Éirinn go Brách !