Ozias Leduc (1864-1955) est incontestablement l’un des peintres les plus importants du Québec. Natif de Mont-Saint-Hilaire, il a peint des sujets très variés, s’adonnant au portrait tout comme au paysage, en passant par la nature morte. Leduc est également derrière la conception des décors d’une trentaine d’églises du Québec, de la Nouvelle-Écosse et de la côte est américaine. Nous vous proposons donc une incursion dans le vaste univers de l’art religieux d’Ozias Leduc.
Ozias Leduc a affirmé toute sa vie qu’il était un autodidacte. La formation de Leduc doit en effet beaucoup aux rencontres avec des gens qui ont su aiguiller son talent.
Le tout commence en 1880 avec Jean-Baptiste-Nectaire Galipeau, son professeur à l’école du village. Ce dernier remarque chez lui un talent particulier pour le dessin. L’enseignant encourage donc son jeune élève en lui fournissant diverses gravures à copier pour développer ses aptitudes au dessin. Cela deviendra rapidement une véritable habitude, puisque Leduc continuera toute sa vie à exécuter des études et des exercices de dessins d’après images.
Les années de formation
En 1883, à l’âge de 18 ans, il décroche son premier emploi rémunéré dans le monde artistique dans l’atelier montréalais du très renommé Thomas Carli (1838-1906), un Italo-Québécois qui est à l’époque l’un des principaux fabricants de statues religieuses en Amérique du Nord. Leduc y est engagé pour peindre les statues de plâtre.
Son talent le mène par la suite à suivre un cursus de formation classique pour un peintre, c’est-à-dire le compagnonnage auprès d’un artiste établi. C’est ainsi qu’il intègre en 1886 l’atelier d’un autre Italo-Québécois, le peintre Luigi Capello (1843-1902), lui-même derrière la conception de plusieurs décors monumentaux d’églises québécoises.
Durant ses années d’apprentissage auprès de Capello, Leduc travaille au décor d’une chapelle dédiée à saint François-Xavier, située dans la Basilique Sainte-Anne-de-Beaupré (malheureusement détruite dans l’incendie de 1922), ainsi qu’au décor de l’église Saint-Paul-L’Ermite, située dans ce qui est aujourd’hui un secteur de la ville de Repentigny.
Au début des années 1890, Leduc assiste également le peintre québécois Adolphe Rho (1839-1905) dans la réalisation de plusieurs ouvrages à thématiques religieuses. Ces premiers contrats offrent une solide formation à Leduc tout en lui assurant une certaine sécurité financière qui lui permettra de construire son propre atelier à Mont-Saint-Hilaire.
Joliette : le début d’une grande carrière
Fort d’une excellente réputation acquise en tant qu’apprenti, Leduc obtient son premier contrat d’envergure à titre de peintre autonome en 1893. Le curé Prosper Beaudry lui passe commande pour un vaste programme iconographique qui se déploiera dans l’église Saint-Charles-Borromée de Joliette1.
Il s’agit de créer un décor qui s’étend dans l’ensemble de l’intérieur du bâtiment au moyen de 8 scènes illustrant divers épisodes de la vie du Christ, de quinze scènes illustrant les mystères du rosaire, ainsi que de portraits de sainte Cécile et du roi David. On demande à Leduc de réaliser un décor en s’inspirant de diverses gravures de peintres européens des 16e et 17e siècles, tels Guido Reni, Titien et Pierre-Paul Rubens.
Ce projet à Joliette permet à Leduc de gagner rapidement en notoriété. Cela lui vaudra d’obtenir, immédiatement après cette première commande, le contrat pour le décor de l’église de son village natal à Mont-Saint-Hilaire. Son implication à Joliette est sans doute un des facteurs ayant contribué à faire de lui l’un des participants récurrents de l’exposition annuelle de la Royal Canadian Academy of Arts.
Shawinigan : la synthèse des genres
Suivra un véritable chapelet de contrats de décors ecclésiastiques, jusqu’à son ultime projet, commencé en 1941 : le décor de Notre-Dame-de-la-Présentation de Shawinigan, auquel il consacrera la majeure partie des dix dernières années de sa vie.
Véritable synthèse des genres, le programme pictural de Shawinigan figure à la fois des scènes typiquement religieuses, tel le Christ en croix et diverses scènes du Nouveau Testament, et des scènes de la vie à Shawinigan depuis sa fondation.
C’est ainsi que l’on retrouve dans ce décor des scènes évoquant tantôt la colonisation, avec ses bucherons et ses agriculteurs, tantôt la vocation industrielle de la ville, nous montrant des ouvriers travaillant dans les nombreuses usines de pâtes et papiers de la région. Et c’est là tout le génie de l’ensemble, qui représente à la fois l’Église céleste, avec le Christ et les saints, et l’Église terrestre, composée des fidèles dans leur vie quotidienne.
Je vous invite donc à profiter de la réouverture des lieux de culte pour aller visiter ces églises et admirer tout le talent d’Ozias Leduc, l’un de nos plus grands peintres.
+ Le Parcours-découverte à la cathédrale Saint-Charles-Borromée de Joliette