La plus précieuse des marchandises de Michel Hazanavicius est un film parfait pour les vacances de Noël qui approchent. Je vous conseille fortement une petite sortie au cinéma pendant votre congé. Est-ce parce qu’il relate l’arrivée miraculeuse d’un bébé dans la vie d’un couple démuni ? La venue d’une lueur d’espoir au milieu d’une guerre qui ne laisse entrevoir aucune issue ? Entre autres. Mais c’est aussi – et surtout – parce que ce film d’animation nous rappelle que rien n’est impossible à l’amour, qu’il peut vaincre ce qu’il y a de plus mauvais en l’homme.
Malgré un scénario dépouillé de répliques, ce ne sont pas les messages qui manquent dans le nouveau long métrage du réalisateur français Michel Hazanavicius basé sur le livre de Jean-Claude Grumberg. Si aucune référence directe aux Allemands, aux nazis ou aux camps de concentration n’est faite, les images parlent d’elles-mêmes et remplacent les mots avec brio.
Se déroulant pendant la Seconde Guerre mondiale, le récit transporte le téléspectateur dans la misère de cette époque où la méfiance envers l’Autre semble avoir pris le dessus sur toute forme de bienveillance. L’Autre, c’est celui de « la race perdue », celui qui a « tué Dieu », qui a « souhaité la guerre », qui est « sans cœur ». Parle-t-on ici des nazis qui envoyaient par train les Juifs aux camps de la mort ? Probablement. De la brutalité de l’homme ? Certainement.
Mais au creux d’une forêt, un couple de pauvres bucherons nous redonne espoir. Alors qu’ils peinent à subvenir à leurs besoins, ils adopteront une petite fille et lui donneront tout du peu qu’ils ont.
Chaque jour, la bucheronne se rend jusqu’au chemin de fer, en priant les « dieux du train », dans l’espoir d’y trouver quelque chose à se mettre sous la dent. En vain. Mais par une journée de tempête, elle trouve finalement dans la neige un tout autre type de marchandise : un bébé. Si ce petit être humain ne remplit pas l’estomac de la femme, il emplit instantanément son cœur de tendresse.
Ce sentiment d’abord refoulé par le bucheron qui rejette l’enfant puisque, venu par le train, il appartient peut-être à « la race perdue ». Mais l’amour étant ce qu’il est, il finit par gagner le cœur de l’homme et le transformer : de pierre, il deviendra chair. Et cet amour conduira les deux bucherons à protéger l’enfant au péril de leurs vies.
Le meilleur et le pire
La plus précieuse des marchandises, c’est le mélange paradoxal et confrontant de l’amour et de la cruauté. Du plus beau visage de l’humanité et de son plus laid. Les images poignantes, voire difficiles à regarder par moment – le film est déconseillé aux moins de 10 ans – accompagnées de l’émouvante bande sonore d’Alexandre Desplat, ne sont pas sans rappeler les horreurs de la Shoah.
Pourtant, Michel Hazanavicius souhaite se concentrer sur la beauté difficilement imaginable à l’époque, mais bien présente là où certains ont été capables de la voir. Car comme le répètent à plusieurs reprises les deux paysans, même les sans cœur ont un cœur. Ceux qui ne croyaient plus en rien sinon au dur labeur et « aux dieux du travail et du train » redécouvrent la bonté du cœur humain.
Difficile de ne pas faire de comparaison avec la naissance d’un Juif du nom de Jésus, venu il y a plus de 2 000 ans pour être lumière parmi les ténèbres. Tel le Christ qui vient au monde, l’arrivée de cette enfant juive est un souffle d’amour qui sauve les deux bucherons de leur calvaire et une lueur d’espérance : le beau et le bon peuvent subsister même dans la plus profonde noirceur.
Je terminerai simplement sur ces mots de Jean-Louis Trintignant, acteur mythique et narrateur de ce long métrage, le dernier avant sa mort : « la seule chose qui mérite d’exister dans les histoires comme dans la vraie vie, [c’est] l’amour ».
La plus précieuse des marchandises sort au Québec aujourd’hui le 20 décembre 2024.