athéisme

De l’avantage d’être bizarre ou le déclin de l’athéisme

L’écrivain et podcaster Britannique Justin Brierley a récemment publié un livre encourageant pour les chrétiens. Après deux décennies à animer des conversations entre des athées et des croyants pour son émission de radio Unbelievable, il peint dans The Surprising Rebirth of Belief in God un tableau global du débat sur l’athéisme.

Si les nouveaux athées comme Richard Dawkins, Daniel Dennett, Christopher Hitchens et Sam Harris avaient le vent dans les voiles au début des années 2000, ils l’ont désormais en proue et leur embarcation fait du surplace.

Naissance et mort du nouvel athéisme

Brierley explique d’abord que cette vague d’athéisme des années 2000 s’est rapidement estompée d’elle-même en raison de conflits internes. Un groupe qui ne s’unit que pour en critiquer un autre ne survivra pas bien longtemps, semble-t-il.

Initialement, le mouvement grandissait à travers de grandes conférences où des têtes d’affiche célèbres discutaient avec un public heureux de critiquer la religion. Mais, après quelques années, certains ont voulu étendre la critique au-delà des autorités religieuses.

Il s’est alors formé une branche woke qui a critiqué le mouvement athée lui-même jusqu’à le détruire. Certains de ces conférenciers, notamment Lawrence Krauss et Richard Dawkins, ont cumulé les scandales à partir de 2011. Jugées trop conflictuelles, ces conférences ont dû s’arrêter. L’écroulement du mouvement littéraire et culturel qui les soutenait s’en est bientôt suivi.

Insuffisances existentielles

Ces conflits internes sont emblématiques de problèmes plus larges pour le nouvel athéisme.

Après avoir délogé les croyants, les nouveaux athées n’avaient pas de remplacement viable à offrir. Leur position matérialiste n’aboutit en effet qu’à un vide de sens. Si nous ne sommes que des atomes qui ont évolué aléatoirement par sélection naturelle, à quoi bon vivre ?

Devant ce désespoir, plusieurs d’entre eux sont allés voir ailleurs pour trouver un sens à leur vie, notamment dans un mélange d’activisme politique (la branche athée woke) et de spiritualités New Age.

Insuffisances intellectuelles

Du côté intellectuel, la liste des problèmes du matérialisme est longue. L’esprit a beaucoup de mal à y trouver sa place, notamment. Que faire de nos émotions, de nos sensations ou de notre rationalité dans une conception matérialiste où il n’y a que des particules et les lois de la physique ? Ce n’est alors pas surprenant que dans les sciences cognitives, depuis quelques années, peu sont ceux qui croient encore au matérialisme.

Le psychiatre britannique Iain McGilchrist – qui n’est pas chrétien – diagnostique même le matérialisme et l’athéisme comme les symptômes d’une maladie mentale dans notre civilisation. Il documente en profondeur son diagnostic dans son livre de 2012 The Master and his Emissary, qui a connu un succès retentissant tant chez les croyants que les non-croyants. Selon lui, le matérialisme athée est une dérive schizophrénique classique de l’hémisphère gauche, caractérisé par sa tendance à simplifier les choses pour les manipuler aux dépens de l’hémisphère droit, qui comprend davantage les choses de façon holistique et avec humilité.

En général, contrairement à ce que laissaient entendre les nouveaux athées, la science du dernier siècle pointe davantage vers l’existence de Dieu que l’inverse : l’affinage des constantes de la physique, le Bigbang et l’infinitésimale probabilité d’apparition de la vie sont d’autres arguments dignes de mention.

Si le nouvel athéisme a connu un succès médiatique et littéraire au
début des années 2000, il s’est plus tard écroulé faute
de fondations intellectuelles solides.

De plus, contrairement à ce que certains propagandistes affirment, aucun historien sérieux depuis la Renaissance ne croit que le monde antique était une civilisation florissante que le christianisme a obscurcie pendant 1000 ans de « dark ages ». La civilisation préchrétienne en était une où la tyrannie, la violence, l’esclavagisme et les abus de toutes sortes étaient le droit des puissants.

C’est à la fois au christianisme que l’on doit la survie de la civilisation classique, dont l’art et les écrits ont été préservés par des moines, et la réforme de cette civilisation qui a adopté les valeurs que nous chérissons aujourd’hui.

Ainsi, si le nouvel athéisme a connu un succès médiatique et littéraire au début des années 2000, il s’est plus tard écroulé faute de fondations intellectuelles solides.

Conseils pour les chrétiens

Brierley termine son livre en offrant quelques prédictions et conseils pour les chrétiens.

Il dit d’abord que le débat n’est plus le même qu’il y a 20 ans. Aujourd’hui, il observe de moins en moins d’intérêt pour les arguments apologétiques classiques comme les cinq preuves de l’existence de Dieu ou l’historicité des évangiles.

En quête de sens dans une culture qui ne peut leur en offrir, les personnes doivent être plutôt guidées pas à pas vers une vision du monde chrétienne dont elles ne connaissent rien. Elles doivent trouver le récit cohérent, plein de sens et attirant. Les arguments classiques viendront plus tard.

Il est crucial aussi pour les chrétiens de rester bizarres, selon Brierley. Alors que l’échec de la culture environnante est de plus en plus évident, il faut maintenir notre distinction. Les gens sentent que cette culture ne les nourrit pas, ils sont prêts pour quelque chose de radicalement différent.

Les Églises qui croissent en Occident n’ont pas honte du surnaturel et affichent fièrement leurs couleurs, qu’elles soient charismatiques ou traditionnelles, par exemple. Au contraire, les Églises qui s’adaptent trop à la culture populaire, comme les anglicanes et les méthodistes, s’éteignent à grande vitesse.

Alors, chrétiens, restez bizarres !

Jean-Philippe Marceau

Jean-Philippe Marceau est obtenu un baccalauréat en mathématiques et informatique à McGill et une maitrise en philosophie à l'Université Laval. Il collabore également avec Jonathan Pageau au blogue « The Symbolic World » et à sa chaine YouTube «La vie symbolique».