Judas
Jakob Smits / Wikimedia Commons

Attention à ne pas juger Judas

Les pires trahisons sont celles de nos amis les plus proches. Le cas de Judas dans l’Évangile en est une illustration frappante. Comment pouvons-nous passer d’ami à ennemi en si peu de temps ? Marcel Pagnol a exploré cette question dans la pièce Judas qui a été présentée dernièrement en radiothéâtre à Québec dans une mise en scène de Myriam Bourget.

C’est une deuxième mise en scène pour Myriam Bourget, qui avait présenté en 2017 Job ou la torture par les amis de Fabrice Hadjadj. Dans ce nouveau projet, elle passe de la figure de la victime à celle du traitre. Monter Judas de Marcel Pagnol lui a permis de réfléchir sur cette figure mystérieuse, mais commune, de celui qui a trahi le Christ.

L’envers du décor

Dans sa pièce, Pagnol montre l’envers du décor, ce dont les Évangiles ne traitent pas. Il imagine Judas au moment de la Passion du Christ. Ce qui est particulier toutefois, c’est que Judas n’est pas montré comme un vilain avare, mais comme un homme pas si différent des autres. Il a une famille, respecte la loi et vit des combats spirituels. 

La pièce pose ainsi des questions primordiales :

  • Qu’est-ce qui fait qu’un homme, ami de Jésus, le trahisse ?
  • Qu’aurait-on fait à la place de Judas ?
  • Comment en est-il arrivé là ?

À l’émission On n’est pas du monde, la metteure en scène a présenté toutes ces tentations qui peuvent faire chuter un homme qui a pourtant connu personnellement et vécu intimement avec Dieu-fait-homme.

La tentation du repli

La première tentation de Judas a été de refuser l’aide du Christ. Il se demande, dans la pièce de Marcel Pagnol, pourquoi Jésus lui annonce qu’il va le trahir. Est-ce pour qu’il se montre fidèle en refusant ou au contraire pour qu’il témoigne de sa confiance en acceptant ? 

Dans ce moment de doute, Pagnol imagine Judas désirant retourner voir Jésus pour plus d’explications, mais freiné par un étranger de mauvais conseil qui lui dit de n’en rien faire. 

Selon Myriam, l’erreur est là. Dans des moments d’incertitudes, « où toutes les solutions nous semblent équivalentes, bonnes et mauvaises », se replier vers soi-même est la mauvaise option. Mieux vaut se rapprocher du Christ : la prière est un moyen de trouver la réponse. 

La tentation légaliste

La deuxième tentation, c’est celle d’obéir à la loi, mais sans la foi.

On voit alors Judas succomber aux demandes des chefs des prêtres, qui lui font croire qu’il ne sera pas un bon Juif s’il n’obéit pas à la loi. 

« Ce n’est pas que la loi n’est pas bonne en elle-même, a ajouté Antoine Malenfant, animateur de l’émission. C’est plutôt si elle est utilisée ou si elle est interprétée d’une manière qui exclut l’amour miséricordieux du Père qu’elle peut alors amener à toutes sortes de dérives. »

L’ultime erreur

L’ultime erreur de Judas fut probablement de ne pas faire confiance au Christ et à son projet.

En livrant Jésus, Judas ne savait pas nécessairement s’il allait mourir ou pas. Il espérait probablement même que son acte entrainerait plutôt des changements politiques majeurs.

Bref, Judas aurait surtout été trop impatient et trop étroit d’esprit.

Qui d’entre vous s’en est lavé les mains ?

En fait, on peut supposer que le comportement de Judas n’est pas si différent de celui qu’auraient pu avoir beaucoup d’autres, comme l’a souligné Antoine Malenfant :

« Si on est un peu honnête avec nous-mêmes, combien de fois on trahit le Christ dans notre quotidien ? C’est une question que la pièce peut nous poser très directement. »

Qui d’entre nous s’en est lavé les mains ?


Pour accéder à la pièce :

Judas de Marcel Pagnol, mise en scène de Myriam Bourget.

Cliquez ici pour écouter la pièce présentée en radiothéâtre.


Ambroise Bernier

Ambroise Bernier étudie la littérature à l’Université Laval. Féru de poésie comme de prose, il révise nos textes destinés au site Web.